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7 mars 2024 4 07 /03 /mars /2024 12:16

Le triomphe de la "théologie" de Kasper à travers Fernandez?

 

 

Le 13 janvier 2024, le courageux évêque néerlandais Rob Mutsaerts, dans son article Cette ambiguïté diabolique (Die duivelse ambiguïteit), a retracé les étapes de la protestantisation et de la démolition du catholicisme aux Pays-Bas. Avec un grand scandale il a vu dans Fiducia Supplicans et dans l'autorisation de bénir les couples homosexuels qui en découle, cette "théorie de la praxis" dont le but est de déformer sournoisement la doctrine catholique, en exploitant une soi-disant "théologie pastorale". En quelques traits de plume, il a souligné les responsabilités "théologiques" du cardinal Fernandez qui serait, avec l'aval bergoglien, le rédacteur non seulement de Fiducia Supplicans, mais aussi "l'auteur caché" du tristement fameux Amoris Laetitia, l’autre document tout aussi confus, qui, de fait, a ouvert toutes grandes les portes à la communion sacrilège pour les divorcés "remariés" partout dans le monde.

Il y a une continuité indéniable entre ces deux documents qui doivent être lus ensemble. Ils apparaissent - et le sont - confus et verbeux, mais suivent cependant une logique assez précise. Les deux textes sont nés de la même (pseudo) théologie dérivée du luthérianisme dont le champion fut Walter Kasper. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, si François, au cours de son premier Angelus, lorsqu’est annoncée la direction future du gouvernement et sont remerciés les artisans de l’élection, l’a salué comme un « bon théologien ».

En d'autres termes, les approximations théologiques auxquelles la pastorale bergoglienne nous a habitués ne sont pas simplement le fruit d'une politique d’ouverture débonnaire et approximative, qui voudrait embrasser tous les pauvres pécheurs malmenés par la rigidité d'un certain moralisme catholique, mais elles sont cohérentes avec la luthéranisation la plus lucide et la plus méthodique du catholicisme selon une lecture kaspérienne.

Nous avons écrit que la pratique de la bénédiction des couples homosexuels a sans aucun doute quelque chose de satanique (Concernant l’abominable Déclaration prononcée aujourd’hui par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi). Par sa “sanctification” de la stabilité du péché, elle éloigne de fait la conversion, et accomplit cette inversion du plan salvifique si chère au prince des ténèbres. Avant même la capitulation ouverte face à l’homosexualisme, l’ouverture de la communion aux divorcés remariés d’Amoris Laetitia relevait de la même logique. Cet article propose notre réflexion sur les racines luthériennes de certains documents récents, en particulier le dernier Fiducia Supplicans. A partir de son titre Fiducia Supplicans n’acquiert sa cohérence logique que dans la théorie de la justification de Martin Luther, comme nous l’avions écrit à propos d’Amoris Laetitia, et implique l’ensemble du dogme catholique y compris l’ecclésiologie et la théologie sacramentaire (cf. Le fond inquiétant de la proposition kaspérienne, L'Eucharistie selon Kasper (II), "Projet Kasper" attaque contre la divine constitution de l'Église).

Pour un examen plus approfondi du sujet de la justification dans la doctrine catholique et protestante nous renvoyons à l’intégralité de notre article: L’influence de Luther derrière la "thèse de Kasper", du 21 décembre 2014, écrit à l’époque où ces questions commençaient à se présenter lors du premier Synode sur la Famille. En résumé, dans la vision luthérienne, le salut a lieu "sans mérite" puisque « l'homme est justifié par l'imputation de la justice du Christ, appliquée dans une mesure égale au moyen de la foi»1, en entend ici par foi”, la dite foi-confiance” luthérienne.

« C’est-à-dire l’homme auquel ont été imputés les mérites du Christ - et qui serait donc un juste - n’est pas pour cela renouvelé par la grâce sanctifiante, n’est pas revêtu de l’habit blanc après avoir déposé l’habit sale du péché, n’est pas une âme nouvelle, un “homo novus”, mais il est une “charogne” (les termes sont luthériens) qui est “enveloppé” par le manteau blanc des mérites du Christ tout en restant “pourriture” à l’intérieur. En restant dans cette image, il est quelque chose d’abominable à l’intérieur - “peccator” -, mais les mérites du Christ lui sont extrinsèquement imputés et le rendent d’une certaine façon “simul justus”. Donc, sans abandonner le péché, il peut être un juste ». Par conséquent le salut arrive sans mérites, sans besoin de bonnes œuvres, sans conversion. « Pour le luthérien peut importe l’état effectif de l’âme, ses dispositions, ses efforts et surtout ses sacrifices, soutenus par la grâce coopérant, pour éviter le péché ou s’en corriger, ce qui compte est une illusoire foi-confiance dans son propre salut, en faisant abstraction de l’application de la volonté, de ses propres mérites et surtout, de fait, du difficile sacrifice de soi et de ses propres caprices. La corruption radicale a porté Luther à la théorisation d’un salut “sola fide”, une “foi” dont la notion - qui aujourd’hui a envahi le monde catholique - est fausse, parce qu’elle n’est pas la foi dogmatique, pour laquelle est essentielle l’adhésion au contenu de la Révélation, mais la foi-confiance dans laquelle ce qui compte est l’aspect pour ainsi dire “sentimental”. Donc “pèche fortement, mais crois plus fortement encore” (“pecca fortiter, sed crede fortius”), c’est-à-dire que plus on est endurci dans le péché, plus on continue de pécher et plus on démontre sa confiance absolue et complète dans les mérites du Christ, les uniques capables de sauver, indépendamment du libre arbitre de l’homme, lequel ne peut rien faire d’autre que “espérer” avec force. “Pèche fortement, mais croit plus fortement encore”, c’est-à-dire si l’état de pécheur et ennemi de Dieu est permanent et s’il est et sera inéluctablement tel, s’il ne reste que la justification imputée par le Christ, qui couvre de son blanc manteau l’homme, pourriture pécheresse et incapable de mérite volontaire, il ne reste rien d’autre que de continuer à pécher, et même il est mieux de s’établir dans le refus de la loi morale de Dieu en péchant encore plus »2.

En péchant encore plus, certes, mais avec Fiducia (foi-confiance), dirait le luthérien. Ce n'est pas un hasard si le titre de l'abominable document qui dédouane de facto l'homosexualité est précisément "Fiducia supplicans". Il évoque ainsi cette Foi-Fiducia (Foi-Confiance) luthérienne qui semble être le fil conducteur, inavoué, du raisonnement. L'âme, imprégnée de "confiance suppliante" en Dieu, ne se préoccupe plus d'invoquer la grâce pour sa conversion, rendant ainsi le salut compatible avec une vie nouvelle. Elle doit stimuler son sentimentalisme suppliant quoiqu’avec la volonté de s’installer dans le péché, y compris par le “ mariage ”entre hommes ou entre femmes sans envisager aucun changement de vie. Car, pour le luthérien (et pour certains émules modernistes qui ont envahi l'Eglise...), si l'homme est plongé dans le péché grave, mais qu'il est en même temps justifié par Dieu sans avoir besoin de changer de vie, il n'y a rien d’autre à faire que multiplier des actes qui ravivent cette Fiducia Supplicans, cette Confiance Suppliante.

À ceux qui objecteraient que les termes des documents ne sont pas aussi forts, on répondra qu'il ne faut pas oublier les vieilles tactiques du modernisme et l'astuce politique consistant à fournir des prétextes, toujours plus faibles à dire vrai, à ceux qui ne veulent pas voir. Et il faut admettre que certains processus conduisent objectivement à certains résultats en raison de l'inexorabilité intrinsèque de la logique des choses.

Le document ambigu en question nous dit, entre autres, non sans effronterie, que la "bénédiction" d’un couple homosexuel, peut éventuellement avoir lieu lors d'un pèlerinage. Cela aussi cache une certaine cohérence luthérienne, puisqu'on conseille que l'acte ait lieu lors d'un "événement fort", pour reprendre la terminologie du sentimentalisme moderniste, un événement "qui réveille la foi", indépendamment de la foi surnaturelle en l’intégralité de la Révélation et de la résolution à faire le bien. En suivant la description du document cela pourrait arriver au cours d'un pèlerinage effectué par le couple homosexuel avec des dispositions si conformes au luthéranisme, que la "bénédiction" pourrait descendre sur la persévérance ou l'obstination dans le péché, en vertu de cette entrainante Fiducia Supplicans évoquée. Une Confiance Suppliante, qui, "comme un manteau" couvrirait même le péché contre nature, public et affiché sans l'ombre d'un repentir. N’est-ce pas là, la doctrine luthérienne du simul iustus et peccator qui condamne le pécheur à mener une vie mauvaise sans véritable espoir surnaturel de Rédemption, lui enlève l’authentique foi surnaturelle, la déformant en une vaine Fiducia (Confiance), et qui ridiculise de fait la raison pour laquelle Notre Seigneur a versé Son Sang, à savoir, nous rendre semblables à lui par la Grâce sanctifiante ? Peut-on mépriser davantage le pécheur homosexuel, qu’en le faisant devenir - le terme est luthérien - une "charogne" incorrigible, au lieu de lui rappeler qu'il est une âme aimée par le Christ qui voudrait qu’il se rachète de sa vie mauvaise et se sanctifie véritablement par les bonnes œuvres?

 

Disputationes Theologicae

 

1 A. Piolanti, La Comunione dei Santi e la Vita eterna, Roma 1992, p. 533.

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17 janvier 2024 3 17 /01 /janvier /2024 16:26

Et championnes involontaires du gender

17 janvier 2024, Saint Antoine l’abbé

Nous proposons au lecteur une homélie prononcée récemment par don Stefano Carusi. Elle précède les faits divers qui ont dernièrement servi de prétexte à la presse mondialo-maçonnique pour déclencher une bataille omniprésente, obsessionnelle et préméditée sur un féminisme goujat et moisi, exploitant avec art les douleurs d'autrui. Le plus triste, c'est de voir une grande partie du monde catholique suivre ce courant mondain, avec un zèle qui oscille entre la servilité et le ridicule. L'intention des centrales du pouvoir est maintenant évidente pour quiconque a des yeux pour voir. Nous avons laissé volontairement le style oral.

La Rédaction de Disputationes Theologicae

 

 

 

Loué soit Jésus-Christ

L’évangile de ce jour nous décrit deux miracles à travers deux femmes guéries par le Sauveur dans leur corps. Mais combien de femmes ont besoin d'être guéries, aujourd’hui, dans leur âme ? "Beaucoup de femmes sont malades spirituellement. Les temps modernes, qui ont apporté le triomphe de l'impiété et de tant d'autres maux, ont érodé l'esprit et le cœur de la femme, la rendant impropre à sa haute mission. Les jeunes filles sont trop vite libérées de l'obéissance et de la soumission à leurs parents, et ceux-ci les négligent trop souvent en les laissant se gâter au souffle corrompu du monde. Les écoles, les usines, les lieux de réunion mettent gravement en danger le cœur de la jeune fille, qui a déjà tant à lutter contre sa vanité, sa légèreté et ses passions naissantes. Comment une jeune fille peut-elle se sauver dans ces circonstances et se préparer dignement à être une bonne épouse et une mère vertueuse ? Quelle lumière peut-elle invoquer pour être éclairée dans le choix de son état de vie et de celui d’un compagnon pour sa vie ?". Ainsi s'exprimait un texte prophétique écrit il y a plus de cent ans, alors que le projet de corruption de la femme commençait à prendre forme. L’auteur poursuit, nous rappelant qu'après la jeunesse, elle entre dans la phase la plus importante de sa vie, celle où elle doit faire ses preuves. Mais au lieu de cela elle néglige ses devoirs familiaux, ne sait pas comment occuper son temps, et au fil des jours, elle n'aimera pas ses enfants, ne les reprendra pas comme elle n’a pas été reprise. C'est le portrait de tant d'épouses et de mères bonnes à peu de choses, parce que pas éduquées lorsqu’elles étaient jeunes filles. Le pire, c'est qu'elles deviennent incurables. Ou presque. Comme les femmes de l'Évangile, elles ne peuvent être guéries que par Dieu. Les médecins humains ne peuvent rien faire. Tellement mal éduquées, mal instruites dans leurs devoirs, elles seront incurables avec les remèdes de la terre. Il faut la vertu de religion. La pratique de la religion et des vertus domestiques. La vertu de religion, si liée à la justice envers Dieu et à la justice envers ce que nous sommes vraiment, envers l'ordre des choses.

C'est ainsi que fleurissent les qualités uniques de la femme. La sensibilité féminine, qualité que les hommes aiment tant. Le contraire de la vulgarité que nous voyons à la télévision et sur internet. La télévision, qu'une fidèle décrivait comme une "incitation à la prostitution".

Et l'autre qualité de la femme, la générosité, par laquelle elle se donne sans compter, de tout son cœur, pour son mari, pour ses enfants.

Et sa capacité à faire mille choses pour le bien du foyer, de la famille, du prochain.

Telles sont les qualités que l'on mettait autrefois en avant. Avec une éducation de la jeune femme très différente de celle de l'homme. C'est pourquoi il est bon que les activités, si ce n'est par nécessité, ne soient pas mixtes, mais aussi distinctes que possible. Et ce d'abord non pas pour des raisons inhérentes au sixième commandement, mais parce que les besoins éducatifs sont profondément différents.

Une noble femme enseignait à sa fille toutes les tâches ménagères. "Mais il y a les domestiques pour cela...", répondait la jeune fille (aujourd'hui, c’est la maman qui est devenue la domestique pour ses filles fainéantes...). Alors la noble femme répondait que pour commander, il faut connaître les choses. Ainsi Pénélope, la reine d'Ithaque, se mettait chaque jour à son métier à tisser. Parce qu'il n'est jamais bon de rester sans rien faire.

Et cela parce que de telles activités, pour la reine du foyer, permettent d'éviter les principaux défauts de la femme.

L'instabilité émotionnelle récurrente, cultivée au contraire en cette époque de sentimentalisme idiot et même de féminisation des hommes. Les hommes, qui ne peuvent même plus faire aujourd'hui une appréciation chevaleresque sans être accusés de ce mot que je ne veux même pas prononcer et que j'exhorte à ne pas répéter parce qu'il est forgé par les centrales de l'endoctrinement lexical. On en est à se demander comment devront faire les garçons pour courtiser une jeune fille.

Et l'autre défaut qui est le désordre dans sa générosité, en voulant tout faire, dans l’excès parfois , et cela même en matière de piété et de prière, en négligeant son mari.

Et j'en arrive ici à un point sensible, qu'un pasteur ne peut pas taire, surtout en ces temps de dépopulation et de familles presque volontairement sans enfants : l’importance du dû conjugal, toujours soutenu par l'Église en vue de la stabilité du mariage et du bien-être de la société, en donnant à Dieu des enfants. C'est-à-dire avoir une disponibilité presque inconditionnelle envers son mari pour les actes qui conduisent à la procréation et qui, s'ils sont accomplis dans le mariage, éloignent l'homme des tentations très dangereuses. Cela est d'autant plus vrai à une époque qui incite au péché sans cesse et partout. Mais parce que nous sommes les descendants de mai soixante-huit et - pire - que nous sommes dans l'ère du gender, les femmes pensent qu'elles sont comme les hommes dans ce domaine aussi. C'est de la folie ! Si le Créateur a voulu que l'homme soit actif, dit saint Thomas, et pour ainsi dire plus agressif sur le plan de la procréation, cela signifie qu'il faut accepter cet ordre en soi et en vue de donner des enfants à Dieu. Le refus des droits conjugaux doit être confessé comme un péché grave. Car, entre autres, il incite le conjoint à une concupiscence désordonnée, en plus peut-être de nous priver de la venue au monde de l'âme d'un autre enfant. Trop peu souvent on entend au confessionnal : "J'ai manqué à mes devoirs conjugaux".

Alors, chères femmes, que le monde veut rendre malades, habillez-vous le plus possible en femmes, et habillez ainsi vos filles, en les éduquant à être des épouses et des mères, et non des modèles de vanité. N'oubliez pas que votre mari est différent de vous, que votre fils doit être éduqué comme un homme. Chères femmes, ne vous faites pas les championnes involontaires du gender. Et posez-vous toujours cette question: que me conseillerait de faire la Très Sainte Vierge pour le bien de ma famille?

Loué soit Jésus-Christ

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18 décembre 2023 1 18 /12 /décembre /2023 12:58

Comment, en conscience, certains peuvent-ils encore se taire?

18 décembre 2023, Neuvaine de Noël

 

 

La déclaration de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi selon laquelle il serait licite de bénir les couples homosexuels n'appelle aucun commentaire. Excepté celui-ci : c'est vrai, ils peuvent être bénis, par un exorcisme.

 

Disputationes Theologicae

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18 octobre 2023 3 18 /10 /octobre /2023 12:53

Un soutien nécessaire aux Cardinaux en résistance

18 octobre 2023, Saint Luc l'Évangéliste

S. Athanase, un prélat qui ne s'est pas tû

Malgré tout, il y a de l'espoir. Il y a toujours eu de l'espoir, bien sûr, mais aujourd'hui le Seigneur nous encourage d'une certaine manière. La crise qui frappe l’Église depuis une soixantaine d’années semble aujourd’hui à son apogée. Les discours de certains pasteurs opèrent de manière toujours plus éhontée le renversement de la vérité et son remplacement par l’erreur (ou même pire). Cette terrible situation ouvre en même temps un horizon extraordinaire sur la force vitale de l'Église, qui trouve toujours en elle-même les ressources pour guérir les blessures, produisant des anticorps même lorsqu'elle est attaquée par la peste purulente du modernisme ou du néo-modernisme contemporain.

 

La récente résistance ouverte d'illustres Cardinaux aux dérives bergogliennes, tout récemment dans le soi-disant "Synode sur la synodalité", montre que le Seigneur insuffle du courage à certains pasteurs et que, si ceux-ci réagissent, tout le troupeau peut s’en trouver encouragé et stimulé. C'est pourquoi ils méritent notre soutien ouvert, celui des fidèles, des prêtres…et, on l’espère, celui d’autres évêques et cardinaux. Un soutien qui, comme le nôtre, n'implique évidemment pas une identification totale avec chacune des positions des courageux opposants, mais un soutien consciencieux à ceux qui - revêtus d'autorité - s'exposent objectivement pour le bien de la vérité catholique.

 

Voici à titre d’exemple quelques extraits des Dubia des très éminents cardinaux Brandmüller, Burke, Sandoval Íñiguez, Sarah, Zen Ze-kiun :

 

« […] C’est une autre préoccupation qui nous anime : nous sommes inquiets de voir qu’il se trouve des pasteurs qui doutent de la capacité de l’Évangile à transformer le cœur des hommes et finissent par leur proposer non pas une saine doctrine, mais des «enseignements selon leurs propres désirs» (cf. 2 Tm 4, 3)

 

[…] Cela est d’autant plus urgent à la veille du prochain Synode, alors que beaucoup souhaitent utiliser celui-ci pour nier la doctrine catholique, précisément sur les points sur lesquels portent nos dubia.

 

[…] des pasteurs et des théologiens, soutiennent aujourd’hui que les changements culturels et anthropologiques de notre époque devraient pousser l’Église à enseigner le contraire de ce qu’elle a toujours enseigné.

 

[…] est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale […] ?

 

[…] Nous craignons que la bénédiction des couples homosexuels ne crée de toute façon une confusion, non seulement dans la mesure où elle pourrait les faire apparaître analogues au mariage, mais aussi dans la mesure où elle présenterait de façon pratique les actes homosexuels comme un bien, ou tout au moins comme le bien possible que Dieu demande aux hommes dans leur cheminement vers Lui.

 

[…] l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constitue un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?

 

[…] le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Évêques (cf. can. 336 C.I.C.) ?

 

[…] Dans Votre réponse, Votre Sainteté a précisé que la décision de saint Jean-Paul II dans Ordinatio sacerdotalis doit être tenue pour définitive. […] Néanmoins, dans le dernier point de Votre réponse, Vous ajoutez que la question peut encore être approfondie. […] Il nous faut donc reformuler notre dubium : l’Église pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que ce sacrement est réservé exclusivement à des hommes baptisés et que cela appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Église ne peut pas changer ?

 

[…] un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ? »

 

Dans toutes les situations de résistance, il est difficile pour ceux qui luttent sans le soutien de l'Autorité suprême de produire une impression qui fasse l'unanimité en tout point. Cette heure qui fait date exige cependant que nous fassions un effort pour soutenir les pasteurs qui témoignent, en laissant de côté certaines logiques trop "doctrinaires" (et parfois presque idéologiques) ou pire "de boutique", qui pourraient nous empêcher de soutenir un combat qui est bon en soi, même si sur certains points nos pensées sont différentes. A cet égard, nous voudrions attirer l'attention du lecteur sur les affirmations du cardinal Müller, dont l'absence parmi les cardinaux signataires de Dubia avait interpellé plus d'un analyste. Le cardinal Müller a attendu et a ensuite apporté son soutien à ses frères cardinaux. Peut-être aurait-il préféré une expression plus forte de désaccord. Il a en même temps publié un communiqué qui affirme en fait que la franc-maçonnerie et son "agenda" sont à l'œuvre au Synode, avec le soutien de quelques clercs Judas.

 

Il a déclaré :

« J’ai défendu la doctrine catholique contre le pseudo-modernisme, en particulier au cours des dix dernières années, remplissant ainsi devant Dieu, en conscience, ma responsabilité d’évêque et de cardinal pour le bien de la doctrine orthodoxe. Mais je suis heureux que d’autres, à leur manière, fassent ce qui est nécessaire et rappellent au pape la responsabilité que Dieu lui a confiée pour la préservation de l’Église dans “l’enseignement des apôtres” (Actes 2, 42).

 

À l’heure actuelle il existe une position hérétique, mais qui favorise la carrière, selon laquelle Dieu ne se révèle qu’au pape François par des informations directes dans l’Esprit Saint, et que les évêques n’ont qu’à répéter aveuglément ces illuminations célestes et à les transmettre mécaniquement comme des marionnettes parlantes. Un évêque, par contre, en vertu de sa consécration, est le successeur des Apôtres et l’enseignant authentique de l’Évangile du Christ, mais il exerce cette charge au sein du collège de tous les évêques avec le Pape comme principe visible toujours présent de l’unité de l’Église dans la vérité révélée et dans sa communion sacramentelle. Telle est la véritable doctrine de la primauté du pape et non le néo-papalisme de ceux qui veulent livrer l’Église du Christ à l’idéologie du capitalisme athée et anti-humain de Davos.

 

Leur prétexte frauduleux est l’adaptation de la Parole de Dieu prétendument obsolète, comme si dans le Christ toute vérité ne nous était pas donnée, aux normes d’une anthropologie pseudo-scientifique anti-mariage et d’une civilisation de mort (avortement, trafic d’embryons, euthanasie, mutilations corporelles par soi-disant changement de sexe).

Tout catholique croit en la vérité divine et catholique que en Pierre les évêques de Rome sont installés comme ses successeurs légitimes. Mais en tant que disciple théologiquement éclairé du Christ, il s’oppose aux caricatures de la papauté, tant à la polémique anti-romaine des réformateurs actuels qu’à la compréhension, à la manière d’un perroquet, du néo-papalisme ou papa-gayisme non catholique. La foi catholique est ridiculisée dans un contexte séculier qui ne croit pas à la réalité de la Révélation historique de Dieu dans le Christ et qui utilise le Pape avec son autorité - peu importe qu'il s'en rende compte ou qu'il y adhère naïvement - pour gagner les masses catholiques, considérées arriérées et non éclairées, au Nouvel Ordre Mondial 2030 ».

A nos lecteurs surtout ceux revêtus de l’ordre sacré nous faisons l’invitation (mais n’est-ce pas aussi un devoir grave?) de rendre public leur opposition à ce qui est en train d’arriver sous prétexte de “synodalité”.

Au sujet du Synode et des erreurs doctrinales qui s’y sont introduites, nous vous invitons à relire les articles :

- Dossier post-synodal. Combien de vérités de foi remises en cause?

- Synodalité collégiale et autocratie des lobbies

 

Don Stefano Carusi

Abbé Louis-Numa Julien

 

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22 août 2023 2 22 /08 /août /2023 17:08

Au Vatican et à la conscience de chacun

 

22 août 2023, Cœur Immaculé de Marie

 

 

« Celui qui penserait la mission prophétique de Fatima terminée se ferait des illusions ». (S.S. Benoît XVI, 13 mai 2010)

 

La chronique, tant civile que religieuse, rappelle souvent l'actualité de Fatima. Pourtant, nous ne voyons aucun appel à une démarche adéquate en faveur de sa relance. Qu’attend-on de plus? Une autre âme damnée ? Le déclanchement d’une bombe atomique?

 

Le 11 février 2021, j'ai envoyé une lettre à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, énumérant les contradictions et les omissions de la publication officielle sur ce sujet, Il Messaggio di Fatima (2000), en demandant:

 

« 1. Pourquoi autant d’omissions et d’incohérences dans une brochure aussi courte?

 

2. Quand une révision en sera-t-elle faite ? (Plus de vingt ans se sont déjà écoulés depuis sa publication, intervenue elle-même quarante ans après 1960) ».

 

 

Réponse ? Un silence éloquent de cimetière (on continue cependant à se référer aux affirmations contenues dans la brochure, comme si de rien n'était). Idem pour le second envoi de la même missive. Pas même un accusé de réception (tant pis pour la plus grande "valorisation des laïcs et des femmes" tellement vantée, et tant pis pour la nouvelle transparence du Vatican).

 

Il est hautement souhaitable que de nombreux catholiques, par exemple les lecteurs de cette revue, envoient de telles lettres à Rome [Le Secret de Fatima. Devant ces questions précises Rome ne dément pas - Fatima. La (tardive) non-réponse de la Congrégation]. Le témoignage insoupçonnable du cardinal Bertone est également encourageant à cet égard: dans son livre sur le sujet, il affirme, à plusieurs reprises, que la [demi] publication du Troisième Secret en l'Année Sainte 2000 a eu lieu également grâce à l'insistance des mouvements consacrés à Fatima.

 

* * *

 

En même temps, il faut espérer que les ressources de Fatima "du domaine public" seront valorisées à leur juste mesure [cf. aussi Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous (Lc 13, 1-5)].

 

Nous pensons bien sûr au Saint Rosaire, dont la Vierge a demandé la récitation quotidienne à chacune de ses apparitions dans la localité portugaise.

 

Mais pensons aussi à la pieuse pratique réparatrice des cinq premiers samedis du mois, dévotion à laquelle la Très Sainte Vierge Marie (dans le Second Secret) a lié des promesses telles que: le salut de nombreuses âmes; la préservation des calamités et des persécutions; la véritable paix temporelle.

 

Face aux si grandes promesses contenues dans la plus grande apparition mariale de l’histoire, celle que la Présentation officielle du Troisième Secret désigne comme « la plus prophétique des apparitions », est-il sage de réagir par l’obstination ou par la résignation et la passivité?

 

 

Claudia Marchini

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29 juin 2023 4 29 /06 /juin /2023 19:28

Des Anglicans à la Fraternité Saint-Pie X... au détriment de la vérité

 

29 juin 2023, Saint Pierre et Saint Paul Apôtres

 

Œcuménisme en marche. L’anglican marié et franc-maçon Baker, soi-disant “évêque”, au trône papale du Latran. L’hérétique copte Tawadros II à l’autel papale du Latran. La Minoritenkirche, église au centre de Vienne dont la propriété a été transféré gratuitement par François à la Fraternité Saint Pie X.

 

Quelle est la dernière énormité bergoglienne en matière d'appartenance à l'Église ? Citons ses toutes dernières paroles, bien dans la ligne de ce qu'il a effectivement accompli avec les Anglicans protestants, les Coptes orientaux monophysites et...la Fraternité Saint-Pie X, qui tous acceptent complaisamment les concessions de sa "main tendue" œcuménique.

 

Il est évident que crise doctrinale, faux œcuménisme et énormités diverses ne sont pas l’apanage exclusif de ces dix dernières années, mais cela ne dispense pas d’examiner avec attentions les récentes détériorations et certains phénomènes.

 

Ecoutons Jorge Mario Bergoglio lui-même lors de l'audience du 29 mai 2023 : « Il y a quelques années, lors d'une rencontre de jeunes. Je suis sorti de la sacristie et il y avait une dame très élégante, riche aussi, avec un garçon et une fille. Cette dame, qui parlait espagnol, m'a dit : "Père, je suis heureuse d'avoir converti ces deux-là, celui-ci vient d'une telle et celle-là d'une telle". Je me suis mis en colère et j'ai dit : "Tu n'as rien converti, tu as manqué de respect à ces personnes, tu ne les as pas accompagnées. Tu as fait du prosélytisme et cela n'est pas évangéliser". Elle était fière d’avoir converti...». Se tournant ensuite vers les Barnabites, il s’est recommandé à eux en disant : « Le prosélytisme ce n'est pas évangéliser » parce que « notre annonce missionnaire n'est pas du prosélytisme, je souligne beaucoup cela, mais le partage d'une rencontre personnelle - "si tu veux, le Seigneur est comme ça, cette vie est ainsi ...", mais pas le prosélytisme - qui a changé notre vie. Sans cela, nous n'avons rien à annoncer, ni une destination vers laquelle marcher ensemble ».

 

Phrases qui - cela va sans dire - ont été reprises avec enthousiasme par toute la presse maçonnique, y compris celle de la gauche caviar... Voyez-vous, la dame n'était pas seulement catholique et soucieuse de la conversion de deux jeunes, mais elle était aussi élégante et riche!

 

Au passage, on peut s’interroger sur la véracité de ces historiettes récurrentes, car même si elles relèvent d’une approche vétéro-marxiste sudaméricaine largement décrépite (même un peu désagréable), elles sont si bien rodées qu’elles revêtent l’apparence d’un "manuel prêt à l’emploi"…

 

Cependant, cette fois-ci, nous pensons qu'il faut plaider en faveur de la cohérence bergoglienne entre ce qu'il dit et ce qu'il fait au niveau œcuménique. Il y a une logique. Une logique perverse, si l'on veut. Mais il y a une logique.

 

Car quel est l'intérêt d'accueillir les Anglicans pour une célébration à Saint Jean du Latran ? Pourquoi, le 18 avril 2023, faire "célébrer" et faire s'asseoir un "évêque" protestant hérétique sur la chaire du successeur de Pierre, dans la Cathédrale des Cathédrales catholiques ?

 

L'autorisation semblait venir de très haut...même si ensuite, face à certaines réactions, le Chapitre du Latran s’est vu obligé, comme d’habitude, "d’ajuster le tir". Manœuvre qui a été jugée par tous peu crédible, avec ses "confusions de traduction de l'anglais" qui ont fait sourire jusqu'aux journalistes. Il Messaggero a même évoqué des « tournures presque comiques »1.

 

Une "erreur de virgule d’anglais" a été évoquée pour plaider en faveur d’une impossibilité de bien comprendre : celui qui avait officiellement "pontifié" au Latran sur la Chaire de Saint Pierre était bien un "évêque", mais anglican, donc non validement ordonné et de surcroît marié et franc-maçon avoué. S’il s’agissait d’une erreur, alors pourquoi faire de même quelques jours plus tard avec un autre chef d'une secte schismatique et hérétique comme Tawadros II, et offrir, au chef de l' "église" copte hérétique, Saint Jean du Latran et profaner ainsi la basilique pour la deuxième fois en moins d'un mois ? Église la plus significative de la terre et du primat de Rome !

 

Pourquoi, œcuméniquement, le "pape des Coptes" a-t-il pu, d'abord enseigner (!) avec une catéchèse sur l'unité des chrétiens le 13 mai 2023, puis célébrer solennellement le 14 mai - dans la Cathédrale du Pape ! - pour tous les Coptes (schismatiques et hérétiques monophysites) présents à Rome, donnant ainsi l'impression qu'ils n'ont pas besoin de se convertir à l'Église catholique pour sauver leur âme ?

 

Cette fois-ci, il n'y a pas eu de déclaration attribuant le fait à des "erreurs de traduction" et à des "virgules" d’anglais. Maintenant, il n'y a même plus la feuille de vigne de l'anglais...et son Excellence Mgr Farrell parle au nom de François d'accueil...et même de « liberté religieuse »2.

 

Le concept devient clair, même pour ceux qui n'avaient pas voulu comprendre jusqu'à présent. Les églises catholiques peuvent être à disposition de tous ceux qui ne sont pas en communion avec l'Église, car telle est la nouvelle direction œcuménique, mais elles sont interdites à tous ceux qui sont soumis à l'autorité ecclésiastique et qui veulent célébrer le rite grégorien latin. Les mesures draconiennes qui ont aboli Summorum Pontificum en sont l’illustration.

 

Concernant les raisons profondes de cette aversion pour le rite traditionnel, dans les paroles autorisées d'un Pape (aspect qui a échappé à certains esprits sectaires), nous renvoyons à notre dernier article La vraie raison pour laquelle la Messe traditionnelle est "problématique".

 

 

Cela explique pourquoi, alors que Traditionis Custodes ferme les églises aux prêtres et aux Instituts qui célébraient le rite traditionnel et leur rend la vie impossible dans la célébration des Sacrements (sauf dans les cas où le bon sens catholique l'a emporté), un accord très, très pratique a été conclu avec la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X.

 

En effet, François a accordé et accorde encore aujourd’hui à cette société, qui à notre avis n’est pas formellement schismatique (même si certaines de ses dérives le sont), mais dont la situation est en rupture canonique avec Rome, plusieurs faveurs : 1) la faculté généralisée d'entendre validement les confessions sans avoir à demander aux évêques résidentiels ; 2) la faculté de célébrer validement les mariages en tout lieu ; 3) la faculté même d'ordonner des prêtres sans la permission de l'Ordinaire local, donc sans encourir aucune sanction canonique. Ce pouvoir, de fait, est d'ailleurs largement amplifié, à ce que l'on sait, par la Curie romaine, puisque lorsqu'elle est interrogée par l'évêque qui veut savoir s'il doit ou non sanctionner un prêtre parti avec la FSSPX, elle répond que - dans ce cas qui "tient beaucoup à cœur au Pape François" - l'œcuménisme "de fait" doit prévaloir aussi bien avec les frères Anglicans séparés du Latran qu'avec les frères Lefebvristes séparés... parce que nous sommes "Fratelli tutti"... sauf ceux qui célèbrent le Vetus Ordo Missae et qui n'appartiennent pas à la FSSPX !

 

Et le discours devient : "de fait" ne les sanctionnez pas. Les autres prêtres qui veulent célébrer le rite traditionnel le comprendront d'eux-mêmes, dans les diocèses ce sera souvent un "non", mais à la Fraternité Saint-Pie X je les laisserai bien tranquilles...et je leur donnerai ce qui les arrange. "De fait", un peu comme lorsque - "de fait" - j'accorde le Latran aux Protestants et aux Coptes ... "de fait".

 

François a été clair sur ce point, nous devons seulement « évangéliser » et non « faire du prosélytisme » car « notre annonce missionnaire n'est pas du prosélytisme, j'insiste beaucoup là-dessus, mais le partage d'une rencontre personnelle - "si tu veux, le Seigneur est comme ça, cette vie est ainsi...", mais pas du prosélytisme ». Ce discours sinistre de l’ "antiprosélitisme" avait déjà alarmé lors de la première année bergoglienne (voir Lettre ouverte au Cardinal Maradiaga). Son retour confirme pleinement les inquiétudes déjà exprimées à l’époque.

 

Il est évident que dans cette perspective, non pas de clarté, non pas de vérité, non pas d'appartenance visible à l'Église, mais seulement d’une générique « rencontre personnelle », les églises (entendues comme bâtiments) sont à donner de préférence à ceux qui sont séparés de l'Église, aux Anglicans, aux Coptes et - pourquoi pas - même à la Fraternité S. Pie X. Après tout, il ne s'agit que d'une « destination à trouver ensemble » au nom de la « liberté religieuse ».

 

Mais il ne faut pas soutenir ces groupes de catholiques « divisifs » (c’est l’hôpital qui se moque de la charité...) qui - tout en restant visiblement soumis à l'autorité romaine - rappellent au contraire qu'il y a un besoin de conversion pour les Anglicans et les Coptes, et qu'il y a un besoin, pour la Fraternité Saint-Pie X, au moins de vérité, de clarté et de correction de certaines dérives.

 

L'évêque d'A. l'a bien compris, lui qui a fermé un centre de messe traditionnelle ( pourtant bien aligné sur tous les aspects doctrinaux et liturgiques, entre autres par crainte de sanctions ) et a déclaré : « S'ils avaient été schismatiques comme la Fraternité Saint Pie X ou comme les orthodoxes, cela aurait été bien, mais le fait est qu'ils veulent être catholiques et continuer la Messe traditionnelle tout en restant dans l'Église, c'est inacceptable ». Peu de mois après et à peu de kilomètres, ouvrait un centre de Messe de la Fraternité S. Pie X. Ut unum sint ? Etrange Unité des chrétiens

 

Tout cela nous semble très clair : la politique est de pousser vers la sortie tous ceux qui adhèrent au Vetus Ordo Missae. Et ils donneront, ou plutôt ils donnent déjà, des églises aux "frères séparés" (à Vienne, par exemple, l'une des plus belles et des plus anciennes églises du centre a déjà été donnée gratuitement par François - avec passage de propriété ! - à la Fraternité S. Pie X !), les traitant tous comme des "églises sœurs fédérées", les Anglicans avec leur rite, les Coptes avec leur rite, l'Église lefebvrienne avec son rite.

 

Ainsi s’explique Traditionis Custodes et ses restrictions contre la messe traditionnelle dite par ceux qui sont soumis à l’autorité, alors que la Fraternité Saint Pie X bénéficie de concessions extraordinaires. La même situation très douloureuse est vécue par les catholiques de rite oriental unis à Rome, mais considérés comme un « obstacle à l'œcuménisme ». Avec cohérence et sacrifice ils ont choisi dans le passé la fidélité à Rome au prix de la persécution. Le nouveau courant ecclésial les traite comme un « obstacle » à la réalisation du (faux) œcuménisme. Celui sans vérité.

 

Le Vatican a de fait jusqu'à présent mieux traité les schismatiques que ses propres enfants, si quelqu'un en doute, qu’il demande aux prêtres catholiques orientaux de Syrie...

 

L’accueil des Anglicans au Latran, relève de la même logique et démolit l’action de Benoît XVI qui, malgré ses contradictions, avait créé l’Anglicanorum coetibus, structure favorisant le retour des Anglicans à l’Unité Catholique.

 

De la même façon, on persécute les catholiques qui célèbrent la Messe traditionnelle dans la fidélité à Rome et on favorise un "accord pratico-utilitaire", très politique - mais sans vérité ni clarté - entre Bergoglio et la FSSPX.

 

Don Stefano Carusi

 

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13 mai 2023 6 13 /05 /mai /2023 11:28

Dit de manière concise par une source faisant autorité


13 mai 2023, Saint Robert Bellarmin et Notre Dame de Fatima

 

 

«Dans la mise en œuvre concrète de la réforme liturgique, les thèses de Luther ont silencieusement joué un certain rôle au point que dans certains milieux, on a pu affirmer que le décret du Concile de Trente sur le sacrifice de la Messe avait été tacitement abrogé. La dureté de l’opposition à l’admissibilité de l’ancienne liturgie était certainement en partie fondée sur le fait qu’on y voyait œuvrer une conception du sacrifice et de l’expiation qui n’était plus acceptable».


(Sa Sainteté Benoit XVI, p.98 de l'édition italienne de son livre posthume; l'édition française omet certains mots)

 

 

Communauté Saint Grégoire le Grand

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25 mars 2023 6 25 /03 /mars /2023 20:09

 

Les "Communaux", les Communautés agraires, les Confréries

 

Dans le panorama multiforme offert par l'État pontifical, la répartition de la propriété foncière présente de nombreux aspects communs avec les administrations contemporaines de l'Ancien Régime, mais, compte tenu des particularités du territoire, elle présente dans certains cas des évolutions singulières.

 

En étudiant l'organisation des "communaux" (usi civici dans l’original italien, ndt) et des terres en propriété collective, il faut noter qu'un traitement général s'avère réducteur, les diversités environnementales susmentionnées ayant entraîné l'adaptation des usages à la géographie.

 

Sur l'ensemble du territoire des États pontificaux, le droit à la propriété foncière collective était reconnu ; tous les habitants de la communauté exploitaient de vastes étendues de terre et exerçaient le droit de pâturage, de coupe du bois et, dans certains cas, de semailles pour les besoins de la famille. Cette forme particulière de tenure agraire devait son existence à la nécessité de protéger les pauvres. Elle permettait, dans une société agricole, à ceux qui n’avaient rien de survivre, de posséder de petits troupeaux et de les faire paître sur les terres communes, de se chauffer, de cuisiner et d’utiliser le bois des forêts publiques, de chasser et de pêcher dans les montagnes et les lacs qui n'étaient pas soumis à une législation purement individualiste e capitaliste de la propriété.

 

En retraçant l'histoire de ces droits, certains en font remonter l'origine à la culture féodale, d'autres vont jusqu'à les rattacher à la transhumance des troupeaux des peuples de l'Italie pré-romaine. Mais l'hypothèse la plus raisonnable semble la plus évidente, retenue ab antiquo et formulée par le cardinal Giovanni Battista de Luca1 au début du 19ème siècle : la raison d'être de l'existence de la propriété commune, à côté de la propriété privée, est inhérente au droit naturel. Elle trouve ses origines lointaines dans la nuit des temps, depuis que les hommes ont ressenti le besoin de la propriété privée, mais ont aussi reconnu la nécessité de l’usage collectif de certains biens. La conception du Cardinal s'inscrit dans la doctrine chrétienne de la richesse, donnée par Dieu à l'humanité pour qu'elle vive et prospère, mais non pour que quelques-uns s'en emparent à leur profit exclusif.

 

Les premiers documents attestant de l'existence de biens communs dans les États de l'Église remontent au XIIIe siècle et concernent Sezze, Pérouse, Orvieto. A Velletri, l'émergence des structures de la commune est attestée par la présence des "procuratores silvae" qui administraient les forêts communales2. De l'autre côté des États, à Bolognola et Visso, dans les Apennins de l'Ombrie-Marche, la propriété collective, est attestée dans le premier de deux cas par un document daté de 13533, « elle couvre jusqu'à 70% du territoire communal, constitué de forêts et de pâturages. L'élevage des moutons et l'exploitation des bois, principales ressources des populations montagnardes, reposent essentiellement sur la propriété collective»4. Ce type d'exploitation était répandu dans de nombreuses localités de l'Italie centrale et permettait aux moins aisés d'élever des moutons et des cochons5. Souvent, l'exploitation réglementée de ces ressources fut à l’origine de la naissance d'une conscience communautaire, qui allait investir même de très petites localités et allait contribuer à la naissance de nouvelles municipalités.

 

Dans une grande partie des marais Pontins, la pêche était pratiquée dans les étangs et les cours d'eau appartenant à la municipalité ; de même, le droit de chasse sur les terres publiques offrait la possibilité d'attraper du gros gibier dans les forêts et du gibier d'eau dans les lacs6.

 

À côté de la propriété collective, les "communaux" (usi civici) ont perduré jusqu'à l'époque moderne; selon de Luca, ils permettaient à certaines communautés ou au baron d'exercer le ius pascendi sur des terres privées à certaines périodes de l'année. Dans certains cas, l'origine de ces droits pouvait remonter à l'époque de la cession par la communauté ou par le seigneur féodal de portions de terre, en réservant toutefois le droit de pâturage et de coupe du bois. Si le cédant était la Communauté, tous les habitants jouissaient des privilèges conservés, c’était les pâturages dits "de jure dominii". Dans le cas des pâturages "de jure cessionis", c’était un particulier qui cédait le droit de pâturage à la Communauté, qui le transférait ensuite à ses membres. Mais le cas le plus répandu était celui des pâturages "de jure civico" ou "consuetudinario", qui remontaient à une tradition immémoriale, selon laquelle les habitants des communautés avaient le droit de faire paître leur bétail sur les terres privées, baronniales, communales, ouvertes (non clôturées) et non cultivées ; ce droit était parfois étendu aux terres après la récolte, après la fauche du foin et dans les bois lorsque trois ans s'étaient écoulés depuis la coupe7.

 

Selon Antonio Coppi, dans ses écrits de 1842, les "communaux" (dans ce cas le ius pascendi) concernaient dans les États de l'Église environ 300 000 rubbie de terre (environ 554 000 hectares), soit environ 13,27 % de l'ensemble du territoire ; mais la situation était beaucoup plus marquée dans le Latium où, selon les données de Nicolaj (les chiffres datent du début du XIXe siècle), dans la délégation de Frosinone le phénomène touchait environ 43% du territoire, dans la délégation de Viterbe plus de 50%, mais dans les limites communales de Bagnaia, Barbarano Romano, Bieda, Vetralla et Viterbe il dépassait 85%, s'élevant à 97,8% pour la seule capitale8.

 

Dans les Marches, peu après la chute du gouvernement papal, il y avait 351 communautés agraires et 22359 terres sous domination collective9.

 

Dans de nombreux cas, les associations agraires étaient chargées de gérer les priorités et les attributions, de défendre et de réglementer les droits acquis avec des statuts spéciaux, elles portaient les noms de Comunanze, Comunità, Università. Ce sont ces institutions qui veillaient à ce que le paysage agraire ne se transforme pas en une kyrielle de troupeaux. Elles empêchaient les abus et les vexations et, surtout, elles défendaient avec acharnement un usage qui permettait de nourrir des milliers de bouches, en favorisant l'émergence d'un sentiment d'appartenance et la protection du bien commun d'un territoire.

 

Aux XVIIIe-XIXe siècles, sous l'impulsion des "Lumières" et des nouvelles théories libérales de l'économie, l'idée de l'abolition des "communaux" (usi civici), au profit de la jouissance exclusive du propriétaire, avança10. Dans les États ecclésiastiques, les nouveautés ne firent que susciter un débat et conduisirent Pie VII à promulguer des réformes dans le domaine de l'agriculture et du commerce des céréales. A ce sujet, le pape Chiaramonti a toujours opéré les changements avec la prudence nécessaire. Un contemporain, le duc Odescalchi explique que le pape ne voulait pas courir le risque de « modifier un système qui avait déjà réglé depuis si longtemps pacifiquement la culture des provinces suburbaines, ni de dépouiller de nombreuses communautés et de nombreux barons d'un droit, peut-être nuisible au bien public, mais qu'ils avaient acquis de la manière la plus légale, soit du prince, soit de ceux qui en avaient joui avant eux »11. Petronio commente : « On avait ainsi tenté de concilier renouvellement et conservation, besoins productivistes et garantie des structures constituées »12.

 

La Notification de 1849 visait à encourager une culture céréalière plus intense sur les terres appropriées. Mais, même cette mesure modérément innovante (dont l'application, non seulement était facultative, mais ne pénalisait pas excessivement les communautés, garantissant aux bénéficiaires des "communaux" une compensation en terres pour ce qu'ils avaient perdu)13, n'a pas eu de grands effets. En 1884, après une enquête dans les ex-territoires pontificaux, la situation semblait, de l'avis d'un ministre libéral, décourageante14.

 

Pour analyser le phénomène, il faut considérer que le gouvernement pontifical avait été extrêmement sensible aux doléances des populations et lorsque, comme dans ce cas, les associations paysannes des communautés avaient fait appel à la bienveillance pontificale pour réviser la loi, le Pape avait freiné son application « de peur que les populations rurales ne se trouvent privées du minimum vital»15. Cette analyse est confirmée en 1887 par le député Giovanni Zucconi qui n'est certainement pas suspect de sympathies envers le gouvernement papal16.

 

Après l’unité italienne, les parlementaires eurent moins de scrupules à bousculer les costumes séculaires : les exigences du capitalisme libéral de la fin du XIXe siècle bouleversèrent l'ordre agraire et social des territoires qui n’étaient plus pontificaux

 

La loi du 27 avril 1888 se révéla « faillible et néfaste (une loi de classe, parce avantageuse seulement pour les propriétaires…). Elle provoqua de violentes réactions paysannes à cause des indemnités trop faibles qui n’étaient presque jamais accordées en terre, et à cause de l’absence de possibilités d’affranchissement en faveur des bénéficiaires»17. Seuls de modestes vestiges des anciens "communaux" furent conservés, ce qui eut pour effet d'exacerber le malaise social18 et de créer un terrain favorable à l'émigration et à l'émergence du social-communisme.

 

Au Parlement, pour défendre les plus démunis, la voix même du député Franchetti s'était élevée. Le 15 décembre 1887 il avait pris la parole pour défendre les droits des associations agraires et avait fustigé ses collègues. Selon le rapport des actes parlementaires il avait affirmé que « l’école classique d’économie […], ferme dans sa seule distinction entre capitalistes et travailleurs »19 ressentait « une antipathie instinctive pour les entités hybrides, telles que les communautés d’usagers dans lesquelles l’individu disparait et qui ont pour but d’assurer un bénéfice à une catégorie de personnes en tant que telle ». Dans sa défense désespérée de ces "corporations de pauvres", il avait déclaré : « c'est une véritable dépossession que vous consommez avec cette loi : vous pouvez bien trouver le moyen d'indemniser les usagers en tant qu'individus, mais en tant que classe, ils restent dépossédés ; c'est une catégorie de personnes qui, par des moyens ordinaires, n’ont aucune manière de se nourrir, qui trouvent dans cette richesse commune du pays un moyen de subsistance supplémentaire, qui les empêche de mourir de faim. Vous leur retirez cet avantage et, en le leur retirant, vous ne leur donnez rien en retour. Et quand vous aurez aussi indemnisé les usagers actuels des droits que vous abolissez, vous aurez créé pour les générations futures une classe de prolétaires qui n'existe pas aujourd'hui » 20.

 

Les Confréries de l'Urbe à la défense des catégories sociales

 

Les rues et les places de Rome, épargnées par les démolitions de la période post-unitaire et du Ventennio, témoignent encore d'une réalité sociale qui s'est également exprimée dans l'urbanisme. Les palais des princes romains se mêlent aux masures des gens du peuple, souvent intercalés d'une chapelle ou d'un oratoire où des personnes de toutes conditions se réunissaient à des dates précises pour solenniser une fête, pour célébrer le saint patron céleste d'une catégorie de travailleurs, pour assister spirituellement et économiquement les pauvres, les prisonniers et les condamnés à mort, ou encore pour commémorer une date importante qui rappelait la lointaine patrie.

 

Les confréries étaient très nombreuses, il pouvait s'agir d'associations de compatriotes ou de métiers, dédiées à des pratiques de piété ou d'assistance, parfois caractérisées par un authentique esprit de corps qui, dans le tempérament romain, se transformait aussi en rivalité innocente. Tous, nobles et plébéiens, ecclésiastiques et commerçants, pouvaient porter un même uniforme et un même emblème, distingués seulement par les signes des fonctions occupées par chacun au sein de l’association.

 

Retracer l'histoire de toutes les confréries romaines est une tâche ardue, mais évoquer leur activité est important pour comprendre la vie quotidien d'un monde qui s’exprimait comme un chœur qui chante à plusieurs voix.

 

Les théories sur l'origine des confréries sont partagées : certains les font remonter à l'aube de la civilisation, d'autres situent leurs premiers balbutiements à la fin de l'âge apostolique, d'autres encore associent leur naissance aux collegia funeraticia (associations reconnues par les autorités romaines qui, en tant que propriétaires de tombes, garantissaient à leurs membres le droit à une sépulture privée), d'autres enfin estiment qu'il est raisonnable de n'en parler qu'à partir du Moyen-Âge.

 

Leur activité dans le domaine de la charité et de l'assistance est rarement niée, mais leur fonction de protection juridique et administrative des catégories sociales ou nationales est souvent négligée ou ignorée. L'importance qu'elles ont eue dans l'ancien régime n'a pas suscité l'intérêt des historiens comme elles le mériteraient, notamment parce que ce qui était souvent une influence charitable auprès des puissants plutôt qu'une ingérence dans l'administration, par sa nature même, laisse moins de traces dans les archives.

 

Il ne faut pas oublier l'impétuosité avec laquelle l'ascendant de ces corporations s'est manifesté sur la scène politique romaine à la mort de Cola di Rienzo en 1354. Rome fut plongée dans un conflit civil dont les membres de la baronnie furent les protagonistes. Avec une détermination exemplaire, les membres de la Compagnia dei Raccomandati della Santa Vergine intervinrent et, forts du consensus et de l'estime inconditionnelle du peuple romain, ils pacifièrent la ville, imposant Giovanni Cerrone comme gouverneur du Capitole et soumettant la ratification de cette nomination au Pape (alors en Avignon)21.

Ces associations ont toujours eu la considération de la population et, dans les moments les plus graves, fortes de l'esprit de corps susmentionné, elles ont exercé leur influence sur les puissants du jour, constituant, dans les moments d'égarement et de désordre, un fort rappel à la concorde de la cité. Pour confirmer l'importance de leur rôle dans les États catholiques de l'ancien régime, il faut rappeler que les confréries ont constamment partagé, avec les ordres religieux, la haine des révolutionnaires, les ennemis du trône et de l'autel identifiant toujours en l'un et l'autre un ennemi dangereux ; partout où arrivaient les "Lumières" ou les jacobins en herbe, que ce soit dans la Toscane léopoldienne ou dans la France de la Terreur, on persécutait les confréries, objet d'une rancœur réservée aux pires adversaires.

 

Dans la Rome papale, l’association en confréries était si importante qu'elle rassemblait et protégeait sous une même bannière tous ceux qui immigraient dans la capitale de la chrétienté depuis les différentes parties du monde. Les confréries dites nationales permettaient à ceux qui avaient une origine commune de célébrer avec leurs compatriotes des anniversaires particulièrement chers, d'observer leurs propres traditions et, dans la ville de la langue latine, de conserver l'usage de leur propre langue.

 

L'archiconfrérie des Saints Ambroise et Charles des Lombards, distincte de celle des habitants de Bergame22, ou celle de Saint Jérôme des Slaves, qui protégeait les exilés slaves de l'invasion turque, se développèrent ; celles de Saint André des Bourguignons, de Saint Julien des Belges, de Saint Yves des Bretons, du Saint-Suaire des Piémontais, du Saint-Esprit des Napolitains, et celles des Lucquois, des Siciliens et des Espagnols prospérèrent.

 

Les franchises accordées permettaient même à un condamné à mort étranger de faire appel à la confrérie de son pays, afin que celle-ci lui procure une grâce ; la confrérie de Saint-Benoît et de Sainte Scolastique « fondée au profit des Nursini à Rome »23 avait le privilège de libérer un condamné à mort de ce diocèse d'Ombrie. Nursie, cependant, se trouvait en territoire papal mais, comme nous l'avons mentionné dans le chapitre précédent, les communautés de l'État bénéficiaient d'un "traitement diplomatique" similaire à celui réservé aux autres États souverains.

 

Les habitants de Nursie n'étaient pas les seuls sujets pontificaux à jouir du privilège d'une confrérie nationale : les Bolognais se réunissaient sous la protection des Saints Pétrone et Dominique, les habitants des Marches invoquaient Notre-Dame de Lorette, les habitants de Cascia vénéraient Sainte Rita, les habitants de Camerino se retrouvaient dans l'église des Saints Venanzio et Ansovino, sur les murs de laquelle figurait l'épigraphe Nationis Camertium.

Les confréries avaient partagé avec les guildes médiévales la défense des prérogatives de certaines catégories de travailleurs et, surtout dans la capitale, elles avaient hérité de leurs fonctions et les avaient développées. Presque tous les métiers avaient leur propre corporation confiée à la protection d'un Saint ; les travailleurs étaient ainsi unis et défendus, alliant pratiques pieuses et esprit d'appartenance. Les Archiconfréries de Santa Maria della Quercia des Bouchers, St Eloi des Ferrailleurs ou Saint Grégoire des Maçons étaient très actives, mais même les métiers les moins répandus pouvaient s'enorgueillir d'une confrérie, comme celle de Sainte Barbara des Artificiers, dont les membres, dans un état pacifique, s'attachaient davantage à saluer les processions par des salves de canon qu'à tirer sur les armées. La confrérie des Cuisiniers et des Pâtissiers, ou la confrérie des Imprimeurs placées sous la protection des Docteurs de l'Église, ou celle des Apprentis tailleurs, distincte de celle des Tailleurs, ou encore la confrérie des Saints Blaise et Cécile des Matelassiers où « ceux qui en dehors de la confrérie avaient une position supérieure, pouvaient se trouver dans l'organisation hiérarchique de la confrérie en subordination à un employé de leur propre atelier »24.

 

Il y avait aussi les universités et les collèges des Vendeurs de poulets, des Tisserands, des Fabricants de macaroni, des Éleveurs de vaches, des Épiciers, des Vendeurs de légumes, des Négociateurs des marchandises qui arrivaient par le Tibre25, des Constructeurs de bateaux, des Vendeurs de poissons ou celui des Peintres et des Sculpteurs, devenu plus tard l'Académie de Saint Luc, tout cela montre bien que l'image de Rome comme ville de parasites ne vivait que dans les pamphlets protestants.

 

Saint Philippe Neri, « le troisième apôtre de Rome », fonda en 1536 une confrérie pour assister les pèlerins du Jubilé : l’Archiconfrérie de la Très Sainte Trinité des Pèlerins et des convalescents. Dans son siège du quartier de la Regola, on pouvait voir des princes et des cardinaux laver les pieds gonflés des pèlerins ou mendier du pain et du vin pour les pauvres, le visage nu et sans capuchon, dans un exercice extraordinaire d'humilité réservé aux premiers citoyens de Rome. Lors du jubilé de 1575, l'Archiconfrérie accueillit 144913 pèlerins tout en continuant à s'occuper de ses 21000 convalescents, et offrit 365000 repas. Le vainqueur de Lépante, le prince Marc'Antonio Colonna, et le Pape lui-même servirent à table. Un concours de charité fut lancé parmi la noblesse romaine et, en 1649, le prince Ludovisi donna « un traitement public à 12000 femmes »26. Une attention particulière était accordée aux pèlerins d'Inde, d'Arménie et de Syrie, qui, après les difficultés du long voyage, trouvaient un accueil chaleureux dans l’Urbe.

 

Les confréries tenaient alors le rôle dévolu aujourd’hui à « l’État-Providence ». Elles remplissaient efficacement leur mission, puisque la capitale de l'État pontifical se targuait d'avoir un hôpital pour 9363 habitants, alors que Londres en avait un pour 4073727.

 

L'Archiconfrérie des Douze Apôtres, chère à Saint Ignace de Loyola, ouvrit, à la demande du cardinal Barberini, une pharmacie qui distribuait des médicaments à ceux qui présentaient un certificat du curé attestant de leur pauvreté.

 

L'État ne dédaignait pas de céder une parcelle de souveraineté, en laissant les administrateurs de la confrérie de Sainte-Elisabeth, chargée de la gestion du grand hôpital de Saint-Sixte percevoir la gabelle sur le bois et l’impôt sur les cartes à jouer. Pour subvenir aux dépenses de la structure, un boiteux parcourait la ville en s'appuyant sur un aveugle, tous deux demandant l'aumône et, après avoir reçu l'offrande, dans une Rome catholique mais pas moralement obtuse, le donateur se voyait remettre du tabac à priser sur une coupelle d’argent28.

 

Les prisonniers étaient pris en charge par l'Archiconfrérie de Saint Jérôme de la Charité. Les statuts stipulaient que « pour le soin de tous les prisonniers, la Confrérie paierait un médecin, un chirurgien et un barbier pour les soigner et les aider dans leurs maladies naturelles » ; il était du devoir des confrères de surveiller la qualité de la nourriture et la quantité de viande donnée aux prisonniers. Un prélat était désigné pour les visiter et apporter les confidences de la famille sans l’intervention des juges29.

La confrérie des Sacconi Rossi était chargée de récupérer les morts noyés dans le Tibre et de les enterrer à ses frais, en partageant cette œuvre pieuse avec les frères de Santa Maria ad Orazione e Morte ; à l'occasion d'une crue du fleuve, les confrères vinrent jusqu'à Ostie pour recueillir les corps emportés par le courant et les préserver de l'outrage des animaux. Mais, les besoins n'étant pas seulement d'ordre naturel, la Confrérie secourait aussi les âmes de ceux qu'elle avait trouvés sans vie, en faisant célébrer des messes en suffrage pour ces malheureux inconnus.

 

L’unification de l’Italie sonna le glas des confréries. Le 18 février 1890, un parlementaire déclara : « Je ne perdrai pas beaucoup de temps au sujet des confréries et autres institutions semblables. On ne peut reconnaître un caractère d'utilité publique à des organismes qui, à quelques exceptions près, ont pour objet de réaliser le spectacle des fonctions religieuses, causes et effets du fanatisme et de l'ignorance, de régler le droit de préséance dans les processions, de défendre les prérogatives d'une image contre une autre, de fixer le mode et l'heure des offices, de régler les sonneries de cloches, les tirs de pétards, etc. Les inconvénients moraux, politiques et sociaux auxquels elles donnent lieu dans l'exercice de leur action sont continuels et graves. Elles sont en un mot plus nuisibles qu'utiles à la société »30. La loi de suppression fut approuvée le 20 juillet 1890, condamnant 11707 confréries31. L'État effaçait l’empreinte catholique de l'assistance publique, s’emparait des hôpitaux, des églises et du mobilier, et dispersait un patrimoine artistique et historique d'une importance indéniable. Luigi Huetter, historien et chantre de la Rome condamnée à disparaître, écrit à propos de la suppression de ces anciennes confréries : « elles avaient eu une habileté et une beauté indiscutables. Devant la loi, elles avaient souvent interprété le bon sens populaire. Contre le blasphème et le crime, elles signifiaient la prière, la foi, le sacrifice. Dans le choc des factions, au milieu des puissants oppresseurs, elles retenaient toutes les classes sociales sous une bannière identique devant l'autel commun. Les pratiques extérieures elles-mêmes paraissaient en accord avec cette époque. Ces pénitents encapuchonnés chantant des litanies à la lueur des torches impressionnaient les âmes simples. Tout le monde pliait le genou devant les frères inconnus. Ces arcanes religieux où le deuil et la mort tenaient une si grande place laissaient un peu de douceur dans les esprits et permettaient d’entrevoir un voyage d'espérance. Mais la mentalité libérale professait que l'évolution des temps exigeait la disparition des confréries, qu’elles soient bonnes ou mauvaises »32.

 

 

La fin de "l'État par corps intermédiaires"

 

Haïs et calomniés autant que son dernier Pape-Roi, les États de l’Eglise formés au cours des siècles sur les ruines fumantes de Rome, s’étendant du Pô au Liri, avaient donné à la Ville Éternelle la grandeur de ses basiliques et l’intimité de ses quartiers. Dans la partie du "Bel Paese" qu’ils administraient, les États Pontificaux avaient permis l’émergence d’un paysage agraire et d’un réseau de villes inégalé. Arrivés à leur crépuscule, ils avaient transmis à l’Italie nouvelle les traditions communales et la société ordonnée par corps intermédiaires qui avaient fasciné les voyageurs du Grand Tour par leur harmonie et qu’une administration centralisatrice s’apprêtait à balayer.

 

A l'entrée des Bersaglieri, on sait que Rome resta immobile, étonnée, incrédule. Au bout de quelques jours, les nouveaux barbares, les "buzzurri", comme le peuple romain appelait les libéraux qui venaient d'arriver, se mirent à marteler les blasons pontificaux, à éventrer le centre historique, à démolir églises et palais, à couvrir l'ancien temple de l'Aracoeli de la masse blanche du Vittoriano, de sorte que la toile de fond de la Via del Corso ne fût pas un édifice chrétien. Sur les ruines de la Rome des Césars et sur le tissu urbain de la Rome papale, on imaginait la construction de la "troisième Rome", selon les aspirations de Mazzini, et pour édifier laquelle il fallait d’abord produire d'abondantes ruines.

 

La destruction de l'ancienne conception de la souveraineté n'épargna aucun aspect de la vie en commun. Autrefois, dans les États pontificaux, l'impératif était la construction de la Civitas Christiana, dans le respect des préexistences et des droits acquis; désormais, le seul credo était l'idolâtrie de l'État.

 

Au nom du soi-disant bien public, les pouvoirs des gouvernants s’étendirent de manière démesurée. Les parlementaires s'arrogèrent le droit de supprimer les ordres religieux et les confréries, de leur refuser le droit de posséder. Les caisses du gouvernement italien, qui s'amenuisaient, furent comblés par le vol des biens de l'Église et des pauvres. Même les tableaux de la Renaissance et les toiles des grands maîtres, arrachés à leur lieu d'origine, prirent le chemin du marché des antiquaires, pour ne plus témoigner dans tous les coins du pays de ce lien séculaire entre religion catholique et mécénat artistique, entre autonomie locale et prospérité passée. Le peuple devait changer ses coutumes et ses traditions par décret royal : plus de processions ni de fêtes populaires, mais uniquement des célébrations de héros improbables du Risorgimento. C'est ainsi que s'imposait « l’État nouveau », celui que les despotes gouvernent le mieux parce qu'il est désorienté et sans racines.

 

Don Stefano Carusi

 

 

1 M. Caffiero, L’erba dei poveri. Comunità rurale e soppressione degli usi collettivi nel Lazio (secoli XVIII-XIX), Roma 1982, pp. 19 e ss. Le texte est remarquable pour le travail de recherche effectué et pour quelques observations intéressantes sur l'histoire économique et sociale, en tenant compte du fait que l'orientation de l'auteur est très éloignée de la nôtre.

2 J. C. Maire Vigueur, Comuni e Signorie in Umbria Marche e Lazio, op. cit., p. 332.

3 A.A. Bittarelli, L'economia integrata silvo-pastorale-boschivo-laniera negli usi civici del 1353 e negli statuti del 1654 a Bolognola, in "Atti e memorie della deputazione di storia patria per le Marche", ser.VIII, IX, 1975 pp. 315 e ss.

4 J. C. Maire Vigueur, Comuni e Signorie in Umbria Marche e Lazio, op. cit., p. 332-333.

5 Ibid., p. 333.

6 Ibid., pp. 334, 335.

7 M. Caffiero, op. cit., p. 19-20.

8 Ibid., p. 20-21.

9 M. S. Corciulo, Il dibattito parlamentare sulla legge 24 giugno 1888, in P. Falaschi (ed.) Usi civici e proprietà collettive nel centenario della legge 24 giugno 1888, Atti del convegno in onore di Giovanni Zucconi (1845-1894), Camerino 1991, p. 95.

10 Depuis 1776, dans le Grand-Duché de Toscane, la législation de Léopold avait initié une forte réduction des usages civiques qui s'est poursuivie au siècle suivant. Cf. L. Acrosso-G. Rizzi, Codice degli usi civici, Rome 1956, pp. 533 et ss.

11B. Odescalchi, in ASRm (Archivio di Stato Sez. di Roma), Congregazione economica, 68/3 cité dans U. Petronio, Qualche spunto sulla questione demaniale in Italia prima della legge Zucconi, in P. Falaschi (ed.) Usi civici e proprietà collettive nel centenario della legge 24 giugno 1888, Atti del convegno in onore di Giovanni Zucconi (1845-1894), cit. p. 68.

12U. Petronio , op. cit., p. 68.

13 Cf. L. Acrosso-G. Rizzi, op. cit., p. 496 et ss. Le texte peut également être consulté pour la législation de la République romaine sur les "communaux" (usi civici), en particulier le décret du 3 février 1849 ; la Notification de Pie IX, plus prudente, est datée du 29 décembre 1849.

14 Pour une analyse de la position de Bernardino Grimaldi, partisan convaincu de l'abolition des usages civiques et ministre de l'agriculture du gouvernement Depretis, voir P. Grossi, Un altro modo di possedere. L'emersione di forme alternative di proprietà alla coscienza giuridica post-unitaria, Milan 1977, passim.

15M. S. Corciulo, op. cit., p. 87.

16 P. Falaschi (ed.), Usi civici e proprietà collettive nel centenario della legge 24 giugno 1888, Atti del convegno in onore di Giovanni Zucconi (1845-1894), op. cit., passim.

17 M. Caffiero, L'erba dei poveri, op. cit., p. 113, note 50.

18 Sur la situation des paysans dans le Latium après l'Unité, cf. A. Caracciolo, Il movimento contadino nel Lazio (1870-1922), Roma 1952 ; G. Pescosolido, Usi civici e proprietà collettive nel Lazio dalla Rivoluzione Francese alla legislazione dello stato italiano, in "Nuovi Annali della Facoltà di Magistero dell'Università di Messina", 5 (1987).

19 M. S. Corciulo, op. cit., p. 93.

20 Atti parlamentari, Camera dei Deputati, Legisl. XVI, II sessione, 1886 - 87 citati in M. S. Corciulo, Il dibattito parlamentare sulla legge del 24 giugno 1888, cit., pp. 93, 94.

21 Statuti della Ven. Arciconfraternita del Gonfalone, tipografia poliglotta della S.C. di Propaganda Fide, Roma l888 ; cf. aussi E. Dupré Theseider, Roma dal comune di popolo alla signoria pontificia, (1252-1377), Istituto di studi romani, storia di Roma XI, Bologna 1952.

22 Les Bergamasques étaient réunis dans la Confraternité des saints Barthélemy et Alexandre.

23 M. Maroni Lumbroso, A. Martini, Le confraternite romane nelle loro chiese, Roma 1963.

24 Ibid., pp. 74-75.

25 Médiateurs dans le commerce des produits arrivant à Rome par voie fluviale, il convient de mentionner l'importance économique des ports de Ripetta et de Ripa Grande sur le Tibre, qui ont tous deux disparu entre la fin du XIXe siècle et le début du siècle suivant.

26 Cenni storici sulla Ven. Arciconfraternita della SS Trinità de' Pellegrini e Convalescenti di Roma, Roma tipografia F. Caputi, 1917 ; M. Maroni Lumbroso, A. Martini, op. cit., p. 427.

27 V. Faraoni, A. Mencucci, Vita del venerabile Pio IX, Roma 1952.

28 , M. Maroni Lumbroso, A. Martini, op. cit., pp.143,144.

29 Ibid., pp. 149-154.

30 L. Huetter, Le Confraternite. Misteri e riti religiosi delle pie associazioni laiche di Roma dalle origini a oggi (réimprimé par D. Paradisi) ), Roma 1994, pp.34-35.

31 Ibid., p. 34.

32 Ibid., p. 36.

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25 janvier 2023 3 25 /01 /janvier /2023 11:09

Et sa proximité avec la Franc-maçonnerie?

 

25 janvier 2022, Conversion de saint Paul

 

Couverture de Franc-Maçonnerie Magazine n° 26, Sept.-Oct. 2013

Il n’est pas dans l’esprit de notre revue d’alimenter ou de diffuser les discours morbides de la presse concernant certaines faiblesses personnelles du clergé au sujet desquelles, lorsqu’elles sont avérées, la sage position de Saint Jean Bosco devrait être prise en compte. Cependant, pressé par un de nos lecteurs concernant une histoire passée admise par le Cardinal Jean-Pierre Ricard, influent président de la Conférence Épiscopale Française pendant des années, nous pensons qu'il est un devoir de proposer des éléments de réflexion. On sait que la presse mondano-maçonnique, aime amplifier de manière démagogique les affaires concernant le sixième commandement lorsqu’elles touchent le clergé alors qu’elle adopte une position ultra-libertine lorsque des quidams en sont les protagonistes. Récemment, elle a souillé l'image de l'Église de France, également en proie à d'autres scandales par un martèlement médiatique dépassant largement la réalité.

Il est évident que certains actes, lorsqu'ils sont avérés, ont une réelle gravité morale intrinsèque. Il est également vrai que tant que quelqu'un ne se charge pas de les diffuser, ils n'impliquent pas nécessairement un scandale public... A cet égard, un certain monde médiatique catholique, voire traditionnel, apparemment soumis à des critères mondains et conformistes doit être réprimandé pour le plaisir qu’il trouve dans la dénonciation des scandales impliquant des autorités de tendance moderniste. À notre avis le débat doit rester sur le plan doctrinal, puisque l'autre est glissant ; d’ailleurs que celui qui se tient debout prenne garde de ne pas tomber... aucun milieu n’est exempt des conséquences du péché originel et il est très peu chevaleresque de fixer le niveau de la confrontation sur ce plan. D'autant plus que ces questions-là sont déjà largement montrées du doigt par l’opinion publique, alors qu'ailleurs l'oubli règne.

 

Malheureusement, le puritanisme hypocrite des protestants et de la culture anglo-saxonne qui nous domine désormais a également déformé la façon de penser de ceux qui se croient de mentalité traditionnelle, en plaçant au premier rang les péchés contre le sixième commandement (ou plutôt certains des péchés contre le sixième commandement). Personne ne croit désormais qu'il existe des péchés contre la foi. Le protestantisme et le catholicisme moderniste en effet, avec leur subjectivisme, considèrent qu'un "comportement inapproprié" (et il semble qu’en fin de compte ce soit le cas de l'accusation portée contre le Cardinal) est plus grave que la négation d'une vérité de foi. Si chacun est libre de construire sa propre foi, tous les concepts qui y sont liés sont relatifs et subjectifs, on ne peut même plus parler de péché contre la foi.

 

Il est évident, dans la perspective catholique traditionnelle, que les actes contre le sixième commandement sont graves, mais il devrait être tout aussi évident que les péchés contre la foi sont gravissimes. Si les premiers se limitent souvent à des affaires privées avec un scandale circonscrit, les seconds - surtout dans le clergé ou le haut clergé - comportent presque toujours un aspect de gravité publique, de scandale généralisé, de corruption du depositum fidei, de la plus grande gravité pour un Cardinal. D'autant plus que, si les premiers peuvent être imputés à la faiblesse, à une chute occasionnelle ou à la surprise, les seconds impliquent généralement préméditation et réflexion.

 

Que ces distinctions soient difficilement accessibles aux hâbleurs de la presse libéralo-maçonnique, ou qu'ils se vautrent délibérément dans la boue pour nuire à l'Église, n'est guère surprenant. Il est surprenant que les ragots scandaleux parviennent, sous prétexte de "transparence", à influencer et même à conditionner la pensée catholique à la recherche d’une utopique et inexistante "impeccabilité du clergé". En revanche, on se moque sans aucune honte des questions principales, celles qui ont trait à la doctrine de la foi !

 

C'est ainsi que les plus hautes autorités ecclésiastiques ont agi - stimulées par les journaux et la pensée dominante - avec une sollicitude totalement inhabituelle lorsque les affaires sont d'un autre ordre.

 

Mais où étaient-ils ces ecclésiastiques érigés en juges très sévères et en gardiens inflexibles de la morale lorsque le Card. Ricard a révélé publiquement sa participation à des séances maçonniques ? En tant que Cardinal en plus ! Nous ne parlons pas d'une erreur commise par un jeune prêtre, pour laquelle - après des décennies - il aurait même eu droit au pardon et à l'oubli, mais d'un scandale public en matière gravissime, passible même d’excommunication dans l'ancien code de droit canonique !

 

Existe-t-il, oui ou non, une hiérarchie des péchés ? Y a-t-il des péchés "graves" et des péchés "gravissimes" ? Est-ce l'opinion publique la source de cette hiérarchie ? En réalité, on ne se déchaine que contre les péchés "graves", qui de plus datent de cinquante ans et sont incertains, mais on ne prend pas de mesures contre les "gravissimes", qui sont publics, récents et sans équivoque, mais qui jouissent des applaudissements médiatiques. Ainsi en est-il de la participation à une "tenue blanche" de la Franc-maçonnerie.

 

Les péchés contre la foi, oui ceux-là, sont "gravissimes" pour un prélat, avec leur aspect souvent prémédité et moins passionnel que d'autres faiblesses moins contrôlables. Mais surtout parce qu'ils touchent un objet - la foi justement - qui est au sommet, qui est suprême, qui est la richesse la plus précieuse à défendre dans l'Église. Quand Son Éminence Révérendissime le Cardinal Ricard s'est rendu à une "tenue blanche" de la Franc-maçonnerie - la Contre-Eglise selon les Papes - comme l'a rapporté Franc-Maçonnerie Magazine ( n° 26, Sept.-Oct. 2013, p. 22), scandale dénoncé dans notre article du 22 février 2014, nous n'avons pas connaissance que le chœur des évêques de France ou les autorités du Saint-Siège aient bougé pour faire justice et condamner le coupable à une abjuration publique et à une demande tout aussi publique d'excuses au peuple scandalisé, comme ils l'ont exigé et obtenu pour l’affaire révélée récemment.

 

Nous ne pouvons pas non plus passer sous silence une question qui traverse notre esprit et celui de certains lecteurs : quelle nécessité y a-t-il d'aller dans une loge quand on est libre de tout conditionnement ? Est-ce toujours un libre choix de fréquenter certains cercles ? Est-ce parfois une nécessité de se lier d’amitié avec eux, les premiers informés "d’erreurs de jeunesse" de prêtres devenus par la suite évêques et cardinaux ? Et qui peut-être - en espérant que ces cas soient limités -ont-ils été promus à des postes de responsabilités précisément parce que contrôlables ?

C'est peut-être une coïncidence, le Card. Ricard se vit confier le rôle décisif de "Cardinal-Conseil" dans ce qui avait toutes les apparences d’une "mise sous commissaire permanent" de l'IBP. Dans quelle mesure, ses choix, non seulement sur ce point que nous connaissons si bien, mais aussi sur bien d’autres dossiers délicats de l’Eglise de France ont-ils été réellement libres ?

 

Nous répondons donc à nos lecteurs en soulignant plusieurs aspects : la gravité de la crise dans l'Église - et malheureusement pas seulement dans le milieu ouvertement moderniste - est telle que les péchés contre la foi, qui dans les cas graves mériteraient une excommunication immédiate et une réduction à l'état laïc, sont réduits à des "sensibilités différentes" ou tout au plus à des "initiatives pastorales inopportunes", mais on ne voit ni sanctions ni même de réprimandes. Certains péchés contre le sixième commandement, vieux de nombreuses années et parfois d’une portée douteuse comme ceux reprochés au Card. Ricard sont devenus impardonnables pour des décennies. Ce sont aujourd’hui les seuls pour lesquels l’autorité ecclésiastique est capable de présenter des excuses, marquant ainsi sa soumission "aux maitres du discours" qui, non seulement dirigent les médias, mais indiquent aussi à l'Église quels sont les péchés graves à punir et les péchés gravissimes à déclassifier.

 

C'est le plein triomphe du subjectivisme dans la foi. Et dans la morale. Dans la foi, puisqu'en rejetant l'objectivité des dogmes à croire, en épousant l'immanentisme le plus éhonté, en minimisant l'importance de la matière doctrinale, on ne conçoit plus la gravité d'un péché contre une vérité révélée par Dieu. Subjectivisme dans la morale, car notre monde est devenu incapable de traiter l'agir humain selon une hiérarchie objective à l’égard de la plus ou moins grande gravité d'un acte. Dans l'analyse, on se laisse influencer par le pilonnage médiatique, qui nous pousse vers un puritanisme à l'américaine et un indifférentisme moderniste dans les vérités de la foi et de la loi naturelle. Cela, oui, c’est grave, même mieux gravissime. Cela crie vengeance aux yeux de Dieu.

 

La Rédaction de Disputationes Theologicae

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1 janvier 2023 7 01 /01 /janvier /2023 22:11

A l’annonce de la mort de Sa Sainteté Benoit XVI nous invitons nos lecteurs à lever des ferventes prières pour la Sainte Église et à réciter le De Profundis pour le repos de Son âme.

 

De profùndis clamàvi ad te, Dòmine;

Dòmine, exàudi vocem meam.

Fiant àures tuae intendèntes

in vocem deprecatiònis meae.

 

Si iniquitàtes observàveris, Dòmine,

Dòmine, quis sustinèbit?

Quia apud te propitiàtio est

et propter legem tuam sustìnui te, Dòmine.

 

Sustìnuit ànima mea in verbo ejus,

speràvit ànima mea in Dòmino.

 

A custòdia matutìna usque ad noctem,

speret Ìsraël in Dòmino,

quia apud Dòminum misericòrdia,

et copiòsa apud eum redèmptio.

Et ipse rèdimet Ìsraël

ex òmnibus iniquitàtibus ejus.


La Rédaction

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