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15 avril 2011 5 15 /04 /avril /2011 20:21

 

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Saint François d'Assise s'adresse au Pape

 

Dans le cadre de la dispute théologique soulevée par notre récent éditorial, nous nous trouvons dans l’obligation, comme d’ailleurs l’exige le but de notre revue, de répondre à certaines interrogations et à certaines objections violentes, parfois même très violentes (signe probable que le problème dénoncé est tout-à-fait réel)  cependant toujours privées de signature.
Il semblerait en effet que ni l’amour de la vérité des défenseurs acharnés d’un traditionalisme « dur », ni le désir d’unité des partisans d’un « œcuménisme de la Tradition » libéral n’a suffit pour susciter chez les uns ou les autres le courage d’une signature.

Il faut aussi observer la convergence singulière de ces deux pôles apparemment opposés, mais en réalité unis quant à leur aversion envers la position théologique et ecclésiale, clairement déclarée, qui a été exprimée ici.

Face à cette attitude nous voulons attirer l’attention sur une « troisième voie ».
On peut être “romain” et exprimer du  respect – même verbal – envers l’autorité ecclésiastique, mais on doit exprimer son propre désaccord  publiquement, quand un danger pour la doctrine de la Foi le réclame.


Dans un effort de synthèse, nous résumons ici les différentes interventions, certaines d’ordre théologique, les autres de type pratico-politique mais avec des renvois théologiques, en cherchant en même temps à montrer les contours de cette troisième voie dont nous avons fait mention dans le titre.

Objections théologiques :

1)      La position de votre revue se réduit, comme celle de tous les Ecclesia Dei, à la défense du texte conciliaire, en soutenant que, dans les textes de Vatican II, tout est absolument et indistinctement obligatoire, et doit être interprété dans l’herméneutique de la continuité ;

2)      Vous avez attaqué le néothomisme des années 30, car désormais votre position  théologique est celle de la nouvelle vague, méprisant la rigueur de cette pensée, avec laquelle on mélange les nouveautés modernistes ;

3)      Vous vous êtes soumis visiblement et canoniquement à une autorité qui convoque la rencontre à Assise ; donc vous êtes de façon implicite, favorables à l’actuel œcuménisme. L’unique solution fidèle aurait été votre rupture avec les autorités ecclésiastiques ;

4)      Vous ne dénoncez pas avec suffisamment de conviction l’œcuménisme et Assise III.

 

Objections de caractère pratico-politique :

     5) Vous avez accusé la Fraternité d’être schismatique ;

6) Les accords doctrinaux entre les théologiens romains et ceux d’Ecône se déroulent bien et les responsables en sont satisfaits ;

7) La preuve en est qu’il y aura bientôt un Ordinariat personnel ;

8) Les Instituts Ecclesia Dei, en oubliant la parabole de l’enfant prodigue, ne veulent pas d’accord entre Rome et la Fraternité ;

 

Nous allons répondre en nous basant tout d’abord sur une donnée théologique, ensuite sur une donnée pratique. Dans un perspective réaliste, nous maintiendrons la primauté du vrai sur l’utile, sans mépriser « l’art politique », au sens aristotélicien du terme, et surtout – comme le disait Mgr Lefebvre lui-même - en tenant compte des nuances de la réalité, qui demeurent irréductibles à une sorte « d’affolement idéologiste »

1)      C’est sur les normes théologiques classiques d’évaluation que nous nous basons pour exprimer une position d’approbation ou de désaccord par rapport à un argument théologique qui n’a pas été défini infailliblement ou qui est de toute façon susceptible d’être approfondi.

Le Code de Droit Canon souligne lui-même la « juste liberté de recherche comme aussi d’expression prudente de ses opinions dans le respect du Magistère de l’Eglise » (can. 218). En effet la Commission Pontificale Ecclesia Dei est un organe canonico-juridique, et non un organe qui aurait ses « propres » positions théologiques, comme le soutiennent et un certain traditionalisme « intransigeant »  et l’Osservatore Romano... En outre, il est bien connu (cela se trouve même dans les Statuts de l’Institut du Bon Pasteur dont fait partie le directeur de ce site libre), que nous ne soutenons pas l’absolue intangibilité des textes d’un tel Concile pastoral. Ils peuvent être revus par Celui qui détient l’autorité suprême dans l’Eglise. Il s’agit en effet de textes qui ne jouissent ni de l’infaillibilité du Magistère extraordinaire infaillible, ni de celle du Magistère ordinaire infaillible dans toutes leurs affirmations. En ce qui concerne la possibilité d’une telle perspective, il suffit de lire la « note théologique » du Concile du 16 Novembre 1964 (Denz. 4350 et suivants). Mgr Gherardini s’est exprimé sur ce même site avec une clarté suffisante  sur le sujet. Nous voulons toutefois ajouter qu’il serait réductif de limiter la critique aux textes du Concile, (critique souvent trop exaspérée et fort idéologique) le problème étant bien plus vaste.

 

2)      Nous n’avons pas renié  le néothomisme, tout au contraire, nous continuons à regarder avec beaucoup de respect l’“Ecole”, même celle dite des « commentateurs ». On se demande parfois si ceux qui soulèvent ce genre de critiques lisent avec attention et objectivité nos éditoriaux. Nous avons simplement fait mention du jugement facile contre le néothomisme qui a été porté du côté du Vatican. Nous somme toutefois de l’avis que la perspective doit être élargie, sans absolutiser le néothomisme, et cela pour éviter le jeu facile de certains théologiens modernes qui voudraient considérer comme une « querelle d’école » ce qui mérite d’être simplement jugé comme une « erreur de doctrine ». Si ces problèmes et ces accusations faciles ont pu être soulevés des deux côtés, c’est justement parce que les colloques doctrinaux ont été mal agencés.

 

3)      Le seul fait d’être canoniquement et donc visiblement soumis au Romain Pontife et aux Evêques en communion avec lui ne signifie pas souscrire et partager tous et chacun des actes non-infaillibles que l’autorité produit ou subit, propose ou semble proposer.
Cela ne signifie rien d’autre que respecter la constitution divine de l’Eglise, tout en se réservant la faculté d’exprimer respectueusement son propre dissentiment, lorsqu’il est théologiquement compatible avec les matières en question. Ce que nous affirmons c’est surtout un principe théologique, et de loi naturelle : ce qui règle et éventuellement permet la résistance à la pleine soumission à la hiérarchie, est l’imposition d’un ordre moralement inacceptable ; au contraire, le fait que la hiérarchie fasse ou dise des choses qu’on ne peut pas partager, n’autorise pas à étendre la résistance à une dimension habituelle ou universelle.

 

 

4)      Pour ce qui concerne la dénonciation de dérives œcuméniques : lorsque l’Osservatore Romano dans un article signé par Renzo Gattegna a dit que l’Eglise devait renoncer à convertir les juifs, notre revue a souscrit une dénonciation publique présentée à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, déjà en Décembre 2010 (un mois avant l’annonce d’Assise III), et a ensuite publié un article à ce sujet.
Jusqu’à présent il n’est pas venu à notre connaissance que ceux qui ont si durement critiqué notre supposé « silence », aient su prendre position face à un épisode si grave. Face à l’évidence d’une affirmation ouvertement en contraste avec la doctrine catholique, notre position est celle de dénoncer de telles erreurs en matière de foi sans aucune réticence. Quant à Assise III, nous demeurons fort contraires aux rencontres interreligieuses, c’est notre position, elle est publique et  connue par le Saint Père comme par l’Eglise en général. Cependant, connaissant  la pensée du Card. Ratzinger à l’époque et ses affirmations sur l’impact désastreux de ces événements, nous attendons les événements pour mieux voir quelle est, dans la « mens » du Pape, la véritable motivation d’une telle rencontre. Peut-être est-elle liée, bien plus qu’on ne le croit, à l’actuel équilibre international ou à des équilibres internes au monde ecclésiastique. En considérant la complexité de la situation, les commentaires, et surtout certaines épithètes réservées au Successeur de Pierre qu’on peut trouver sur les sites du milieu traditionnel nous semblent inopportuns.

Il est d’ailleurs impossible de comprendre la logique de ceux qui veulent soutenir que les colloques théologiques entre Ecône et Rome vont bien, tout en affirmant l’indicible gravité de la future rencontre d’Assise III ; en effet, en raison du caractère  « doctrinal » qu’on a voulu donner à de telles rencontres, si ces dernières se passent bien cela signifie que dans les faits, l’actuel œcuménisme ne pose pas de problèmes aux interlocuteurs.

 

[Fin de la première partie]

Accéder à la seconde partie

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