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Dieu est-il la cause du péché?

par Disputationes theologicae

29 septembre, Saint Michel Archange

(II)

 

La responsabilité de l'homme dans le péché est niée

 

POUR LIRE LA PREMIERE PARTIE CLIQUER ICI

 

Origine métaphysique du péché

De Dieu en tant que Cause Première vient radicalement toute la perfection nécessaire pour pouvoir agir de la créature rationnelle. Tout ce qui est de l’être dans l’opération de l’agent libre, même mauvaise, doit être reconduit à la causalité universelle de l’esse. Pourtant la motion divine ne peut pas s’étendre à l’aspect malicieux du péché car elle ne peut pas être à l’origine de la destruction de l’ordo ad finem introduite par le mal commis.

La possibilité même de « l’existence » du péché est due à la condition de la créature rationnelle en tant que créature. En effet, dans une substance créée l’acte d’être n’est pas subsistant (le propre du Créateur) mais participé, c’est-à-dire reçu dans un sujet (l’essence) réellement distinct de l’esse, le sujet qui est alors comme une puissance par rapport à l’acte d’être. La composition de l’acte et de la puissance est propre donc à la créature comme telle et c’est justement cette potentialité par rapport à la perfection de l’acte qui entraine la possibilité même d’avoir une perfection ou non, que ce soit une simple absence ou un mal à proprement parler : « Privatio autem non sit nisi in ente in potentia, quia hoc privari dicimus quod natum est habere aliquid et non habet »[1].

Le mal du péché, c’est-à-dire un manque d’actualité due pour agir bien dans l’ordre moral, ne peut être que la conséquence du fait que la créature rationnelle, « tirée du néant » par la Création et en puissance par rapport à l’être et au bien, ne possède la perfection de l’être et du bien que par la participation. C’est aussi le cas de la volonté créée qui, étant un bien particulier (par participation), ne possède pas par nature la ratio de Bien Universel, étant son objet adéquat et sa fin ultime[2].

La volonté créée,  par sa nature de créature, n’étant pas sa fin ultime, est en puissance à s’inscrire dans l’ordo ad finem par les opérations volontaires qui la rendent parfaite dans la tension intentionnelle vers la fin ultime ; cependant la volonté étant radicalement en puissance par rapport à son objet propre et sa fin, elle peut être assujettie à une privation de cet ordo ad finem par un acte volontaire défaillant qui est désordonné et désordonnant[3].

La défaillance de l’acte doit être donc associée uniquement à la défectibilité de la volonté de l’agent créé devenant (de façon volontaire) une cause déficiente, et qui par conséquence n’émet pas d’opération qui participerait de façon suffisante à l’actualité de l’être pour être bonne et parfaite dans l’ordo ad finem[4].

Quant à Dieu, qui est la seule source de l’actualité de l’esse (son effet propre), il ne fait que proportionner le degré d’actualité nécessaire à l’opération, et cela en prenant compte de la nature et de l’état de la cause seconde, donc aussi de la possibilité de la perfection ou de l’imperfection de l’acte volontaire due à l’état de créature.[5]

 

Conclusion

Sous l’aspect physique aucune opération volontaire n’échappe à la causalité divine car chaque opération doit avant tout être, c’est-à-dire elle doit avoir une certaine participation à l’actualité de l’esse. S’il s’agit d’un acte moral bon, la causalité divine est présente aussi sous l’aspect moral, Dieu attirant l’agent libre en tant que Bien suprême[6]. S’il s’agit de l’acte moral mauvais, il serait par contre nécessaire de bien distinguer le rôle de Dieu et de l’homme dans la constitution métaphysique d’un tel agir.

Quant à l’aspect physique, la créature ne peut pas être une source radicale de l’actualité (ce qui revient à l’Ipsum Esse Subsistens) de l’acte peccamineux qui, en tant qu’opération, doit s’inscrire dans la causalité universelle de l’esse pour avoir (au travers de la substance)  d’une certaine actualité, sans laquelle il « tomberait dans le néant »[7].

Quant à la malice de l’acte, qui consiste formellement dans un désordre moral, la défaillance de l’opération volontaire ne peut avoir pour cause (déficiente) que la créature rationnelle qui, ayant reçue toute sa perfection de l’être et de l’agir de Dieu, est par soi beaucoup plus « proche » du néant que de l’être et du bien[8]. C’est par le biais de cette défectibilité, propre à l’être en puissance, par rapport à l’actualité de l’esse et au bien, que la créature rationnelle peut « introduire » une privation d’une perfection due dans l’ordre de l’opération volontaire, c’est-à-dire le péché.

L’action de Dieu s’arrête alors au niveau de la causalité purement matérielle, c’est-à-dire que Dieu, en englobant par sa causalité universelle l’opération d’un agent créé, soutient aussi dans l’acte l’opération qui est de fait le sujet d’un mal à cause d’une défaillance libre d’une créature rationnelle. Cependant la responsabilité formelle du défaut de l’acte volontaire, qui devient alors immoral, tombe sur la créature rationnelle qui, en raison de sa défectibilité radicale, défaille dans son choix libre et commet le péché. Pour cela Dieu n’est en aucune mesure la cause du péché sous son aspect formel de reatus culpae. S. Thomas le résume bien dans le corpus du De Malo, q. 3, a. 2:

« Puisque Dieu est le premier principe du mouvement de tous les êtres, certains d'entre eux sont mus par lui tout en se mouvant aussi eux-mêmes, comme ceux qui sont doués du libre arbitre. […] Si au contraire, ils manquent à l'ordre requis, il en résulte un acte désordonné, qui est l'acte du péché; et ainsi, ce qu'il y a là d'acte se ramène à Dieu comme à sa cause, mais ce qu'il y a de désordre ou de déformation n'a pas pour cause Dieu, mais seulement le libre arbitre.

C'est pourquoi on dit que l'acte du péché vient de Dieu, mais que le péché ne vient pas de Dieu ».

 

Łukasz Zaruski  

 

 

[1] Saint Thomas d’Aquin, Ibid, a. 2, co.

Aussi : « Ad primum ergo dicendum quod in Angelis non est potentia ad esse naturale. Est tamen in eis potentia secundum intellectivam partem, ad hoc quod convertantur in hoc vel in illud. Et quantum ad hoc, potest in eis esse malum ». Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, Ia, q. 63, a. 1, co.

« S. Tommaso indica la ragione profonda di tale defettibilità : tratti dal nulla, gli esseri creati sono composti di potenza e di atto : ora la potenza, com’è soggetto dell’atto, così può ben esserlo della privazione dell’atto, e dunque anche del male, ch’è la privazione di bene. » A. Piolanti, Ibid., p. 216.

[2] « Unde et natura rationalis, quae ordinata est ad bonum absolute per actiones multifarias, non potest habere naturaliter actiones indeficientes a bono, nisi ei naturaliter et immutabiliter insit ratio universalis et perfecti boni; quod quidem esse non potest nisi natura divina. Nam Deus solus est actus purus nullius potentiae permixtionem recipiens, et per hoc est bonitas pura et absoluta. Creatura vero quaelibet, cum in natura sua habeat permixtionem potentiae, est bonum particulare. Quae quidem permixtio potentiae ei accidit propter hoc quod est ex nihilo. Et inde est quod inter naturas rationales solus Deus habet liberum arbitrium naturaliter impeccabile et confirmatum in bono: creaturae vero hoc inesse impossibile est, propter hoc quod est ex nihilo » Ibid., ad 1.

[3] « Nella misura in cui una volontà sarà in potenza al proprio oggetto, se lo dovrà conquistare, o non lo possiederà in modo perfetto, si darà per lei la possibilità a esserne privata, cioè possibilità di male e di peccato. » A. Piolanti, Ibid.

[4] « Malum quod in defectu actionis consistit, semper causatur ex defectu agentis. In Deo autem nullus defectus est, sed summa perfectio, ut supra ostensum est. Unde malum quod in defectu actionis consistit, vel quod ex defectu agentis causatur, non reducitur in Deum sicut in causam. » Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, Ia, q. 49, a. 2

 « Mais la volonté finie, comme telle, peut se détacher, se mettre en « discorde » avec la volonté de Dieu. Ceci n’est pas une perfection, car ce n’est pas une participation mais un manque de participation. C’est une déviation, une chute véritable, qui donc se rapporte à la seule créature. » C. Fabro , Ibid., p. 498, n. 159.

« Le caractère de déformité morale du péché exprime une “chute” hors de l’être et doit s’attribuer à un défaut du libre arbitre, imputable seulement à la créature ». Ibid., p. 500, n. 162.

[5] « Licet causa prima maxime influat in effectum, tamen eius influentia per causam proximam determinatur et specificatur. » Saint Thomas d’Aquin, De Potentia, q. 1, a. 4, ad 3.

« Causa prima magis influit in effectum quam secunda, ideo quidquid perfectionis est in effectu, principaliter reducitur ad primam causam; quod autem est de defectu, reducendum est in causam secundam, quae non ita efficaciter operatur sicut causa prima. » Ibid., q. 3, a. 7, ad 15.

[6] « Deus sit primum principium motionis omnium, quaedam sic moventur ab ipso quod etiam ipsa seipsa movent, sicut quae habent liberum arbitrium: Quae si fuerint in debita dispositione et ordine debito ad recipiendum motionem qua moventur a Deo, sequentur bonae actiones, quae totaliter reducuntur in Deum sicut in causam » Saint Thomas d’Aquin , De Malo, q. 3, a. 2, co.

[7] « Ciò non significa che nessuna creatura possa muovere un’altra all’azione, ma solo che questa mozione positiva di una creatura nei riguardi di un’altra, sia essa fisica sia morale, suppone la mozione metafisica immediata di Dio, che resta sempre l’unico principio di ogni actualità sia accidentale sia sostanziale. » A. Piolanti, Ibid., p.135.

[8] « Il male è la discesa dell’essere verso il nulla, il bene è l’ascesa verso Dio : non è nè nulla nè Dio, ma s’inserisce quasi per una legge naturale nel bene creato, che essendo finito è soggetto alla molteplicità e alla limitazione e quindi alla defettibilità nell’essere et nell’operare. » P. Parente, Ibid., p. 533.

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La responsabilité dans le péché

par Disputationes theologicae

Pour disculper l'homme accusent-ils Dieu?

15 juillet, Saint Henri Empereur

 

 

L’abolition du péché avec l’effacement de la notion d’acte mauvais volontaire de la créature et de la responsabilité de cette dernière dans son accomplissement, est l’élément déconcertant qui apparait dans les interventions des “prophètes” de la “nouvelle morale” et qui parfois semble même se présenter dans certaines interventions officielles. Au point de vue spéculatif, les voies suivies par les novateurs ne peuvent  pas toujours être rapportées à un système, cependant la forte influence de la pensée hégélienne sur la pensée moderne a poussé, de manière plus ou moins consciente, certaines “théologies” vers une mentalité panthéiste. La confusion investie souvent aussi le rapport entre le Créateur et la créature dans les actes libres, en arrivant parfois à attribuer de manière confuse à l’un et à l’autre les actes moraux objectivement mauvais. La moralité de l’acte libre est mise ainsi en discussion et par cette voie on peut également arriver à disculper complètement la créature de toute responsabilité dans le péché, en parvenant ainsi à introduire la contradiction en Dieu. Avant d’approfondir un tel aspect il faut tout d’abord approcher la question de la causalité divine et plus particulièrement des rapports entre Dieu Cause première et le péché, en distinguant ce qui est attribuable à l’Auteur de l’être et ce qui est par contre la faute de la créature faillible.

 

Dans le travail qui suit, en faisant recours à Saint Thomas d’Aquin, on montre l’inconsistance de cette structure de pensée qui, si elle n’attribue pas ouvertement à Dieu l’acte moral mauvais de la créature, promeut du moins une confusion très dangereuse qui finit même par presque soutenir une responsabilité de Dieu dans le péché. Lorsqu’on veut déresponsabiliser complètement l’homme, sur les pas d’une voie plus ou moins panthéiste, le danger peut aussi être celui d’introduire la contradiction dans la Cause Première, en posant ainsi les prémisses de la négation de Dieu.

                                                                                                            La Rédaction

 

Dieu est-il la cause du péché?

(I)

Parmi tous les maux le péché, le mal commis, constitue la plus grande tragédie pour l’homme (comme d’ailleurs pour l’ange) car il introduit un désordre radical par rapport au bien dans sa propre vie  morale, et a fortiori dans la vie sociale[1]. Le mal et les souffrances (dont l’homme est souvent la cause) deviennent aussi très souvent un argument contre l’existence de Dieu Bon et la source infinie de toute bonté[2]. Dieu a bien créé des gens mauvais et les faiblesses des hommes, est-il aussi responsable de leurs péchés ? Cause Première est-elle également une cause de toutes ces atrocités et ces erreurs commis par les hommes au cours de l’histoire ? Si sans Dieu nous ne pouvons rien faire, ni de bon ni de mauvais, sommes-nous responsable de nos choix ? Pour donner une réponse à de telles questions au plan théologique il faudrait bien distinguer le rôle de Dieu et le rôle de l’homme dans le péché.

Pour ce but on essayera d’établir dans ce travail quel est le rapport entre Dieu et les différents aspects de l’acte peccamineux. Le péché comme tel est un mal commis ou autrement dit une opération volontaire mauvaise. D’abord c’est une opération, un acte second dont la volonté est le principe. Pour cela on parlera avant tout du rôle de Dieu par rapport à l’exercice même de l’acte volontaire en tant que tel. Ensuite, après avoir précisé aussi la nature du péché en tant qu’un mal de l’opération, on examinera si un rapport causal (et éventuellement de quel type) entre Dieu et une telle opération mauvaise est possible. Dans la dernière partie on parlera de l’origine métaphysique de la malice du péché pour pouvoir répondre enfin à la question si Dieu a une part quelconque dans l’acte peccamineux et s’il en est responsable.

 

Fondement métaphysique d’une action de la créature libre

La doctrine révélée de la Création et la métaphysique de l’esse de Saint Thomas présentent une vision des créatures comme profondément dépendantes du Créateur dans tout leur être mais aussi dans tout leur agir[3].

Par la Création Dieu seul, l’Ipsum Esse Subsistens, fait participer aux créatures l’esse ut actus qu’il possède de façon substantielle. Cet esse participé aux créatures apparaît comme la perfection la plus radicale ; c’est l’acte de tous les autres actes et la perfection la plus intense et la plus universelle, car chaque autre perfection dans la créature, avant d’être une telle ou une telle perfection, doit surgir du néant et être[4].

En effet, l’esse (ut actus) est la source de toute actualité de la substance créée (par la médiation du principe formel quo qu’est la forme substantielle), c’est-à-dire de son être en acte substantiel, mais aussi des êtres accidentels en acte qui, étant inhérents à la substance, dépendent radicalement de son actualité[5]. Il s’ensuit que l’action, un des accidents de la substance, n’échappe pas à l’influence de la Cause première dans l’ordre de la causalité universelle de l’esse, et pour cela l’actualité accidentelle dans l’ordre de l’agir ne peut pas être extrinsèque à la causalité première de Dieu[6]. Cette omniprésence de la causalité universelle de l’esse qui arrive jusqu'à soutenir dans l’acte l’opération de la créature est appelée communément la motion divine.

Aucune action n’échappe à la motion divine. L’influence de la Cause première est également nécessaire quant à l’exercice même de l’activité volontaire d’une créature libre[7]. Cela vaut aussi bien pour l’acte bon comme pour l’acte mauvais, tous les deux étant des opérations d’une substance[8]. Quant à l’acte moral bon, une participation à l’actualité de l’esse est indispensable pour qu’il soit, et surtout pour qu’il soit bon et parfait (une participation à une certaine perfection de l’esse est a fortiori une participation au bien, ens et bonum convertuntur), c’est-à-dire pour pouvoir inscrire effectivement l’agent dans l’ordo ad finem. Il faudra par contre distinguer le rôle métaphysique de Dieu dans l’acte mauvais (le péché) qui, jouissant d’une certaine manière de l’actualité de l’esse (donc du bien), détourne pourtant l’agent libre de sa fin.

Péché comme un mal de l’opération

Le péché est formellement une opération libre défaillante, ou autrement dit un mal commis (reatus culpae). Sous son aspect générique de mal, le péché s’oppose au bien, c’est une sorte d’absence d’un bien (donc d’une certaine actualité de l’être). Pour cela le mal n’est pas un être, per se il ne jouit en aucune manière de la perfection de l’esse[9].

Plus précisément, le mal (donc aussi le péché) est une privation, une absence de perfection due, pouvant apparaitre uniquement dans un être en puissance qui est (en tant qu’en puissance) un sujet assurant la continuité entre les deux termes qui sont la possession en acte d’une perfection et l’absence de celle-ci[10].

Le mal en général, étant une sorte de privation, présuppose alors toujours un sujet qui serait un « hôte » pour un tel « parasite ». Le mal peut en effet s’introduire au niveau de l’acte premier, c’est-à-dire de la perfection de l’être substantiel, et cela est un mal physique (reatus poenae) ; cependant l’opération d’une créature rationnelle peut être également privée de la perfection due pour agir moralement bien dans l’ordre de l’opération (l’acte second), et cela est justement le mal commis, le péché (reatus culpae)[11].

En effet, le mal peut apparaitre aussi dans l’ordre de l’agir dans lequel l’agent libre, par l’opération de la volonté, se dirige librement (et rationnellement) vers un bien et en jouit[12]. Quant à l’acte moral bon, celui-ci possède toute la bonté (donc aussi toute l’actualité de l’être) nécessaire pour mettre l’agent dans un ordo ad finem. A l’acte peccamineux manque cette perfection nécessaire, ce qui au lieu de produire l’ordre moral produit un désordre par lequel est coupée la relation intentionnelle entre la créature et sa Fin ultime. Il faudra alors expliquer si Dieu, qui par la causalité universelle soutient dans l’acte chaque opération (bonne comme mauvaise), peut être également une cause, d’une manière ou d’une autre, de l’acte défaillant par lequel la créature se sépare de lui.

 

Dieu et le péché

Dieu ne peut pas être une cause du péché per se. En effet, le mal comme tel ne peut jamais avoir une cause per se, car étant une absence de bien dû, il ne peut être l’objet du vouloir d’un agent (dont l’objet du vouloir per se c’est le bien) que per accidens, ni être causé per se comme un être venant à l’existence par les biais d’un agent (car le mal est un non-ens), ni être fait dans l’ordre (le mal est un non-ens ne pouvant pas entrer dans l’ordre)[13].

Dieu ne peut pas être non plus une cause per accidens du péché (comme c’est le cas pour le mal de la peine). Par le péché l’agent libre se détourne de sa Fin ultime ; mais l’œuvre de Dieu ad extra, la Création, est une participation de l’esse qui implique, à côté de la causalité efficiente et exemplaire, aussi la causalité finale. Le Créateur, le Bien Suprême la Fin ultime, étant l’auteur de l’exitus du cosmos (et de l’homme) est aussi l’auteur du reditus de toute créature, spécialement de la créature rationnelle[14]. Pour cela Dieu en étant un principe du péché, même per accidens, se nierait Lui-même en tant que la Fin ultime[15]. Il s’ensuit que Dieu ne peut être en aucune manière une cause du péché en tant que cela est une opération défaillante qui détruit l’ordo ad finem d’une créature rationnelle.

A SUIVRE…

Łukasz Zaruski

 

[1] « Il male morale, tutto proprio della creatura razionale, supera in intensità ed estensione il male fisico e sconvolge continuamente la vita individuale e sociale dell’umanità, che ne sente il doloroso disagio » P. Parente, Teologia Viva II, Dio e i problemi dell’uomo, Rome, Belardetti, 1955, p. 539.

[2] La constatation du mal en tant que tel est d’ailleurs le premier argument contre l’existence de Dieu mentionné par Saint Thomas dans son article de la Somme sur les quinque viae : « Videtur quod Deus non sit. Quia si unum contrariorum fuerit infinitum, totaliter destruetur aliud. Sed hoc intelligitur in hoc nomine Deus, scilicet quod sit quoddam bonum infinitum. Si ergo Deus esset, nullum malum inveniretur. Invenitur autem malum in mundo. Ergo Deus non est. » Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, Ia, q. 2, a. 3, arg. 1.

[3] Quant au Magistère, on peut citer par exemple : « Et non seulement Dieu, par sa Providence, soutient et gouverne toute la création ; mais c’est Lui qui en réalité communique le mouvement et l’action à tout ce qui se meut et à tout ce qui agit ; et de telle sorte qu’Il prévient, sans l’empêcher, l’influence des causes secondes ». Catechismo Tridentino, Siena 1992, Cantagalli, p. I, art. 1, n. 30.

[4] « Comme tous les actes et toutes les perfections de l’être sont actualités par l’esse (participé), qui est l’acte κατ΄ξοχήν, acte et toujours acte et seulement acte, même si par participation, Dieu, qui est l’esse (par essence) et par suite cause propre directe et immédiate de l’esse participé, est cause propre directe et immédiate de tous ces actes et de toutes ces perfections. » C. Fabro, Participation et causalité,  Béatrice-Nauwelaerts, Louvain-Paris, 1961, p. 406.

[5]« Actualitas formae accidentalis causatur ab actualitate subiecti. » Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, Ia, q. 77, a. 6, co.

« Inter essentiam igitur et habentem essentiam non cadit aliqua potentia media quantum ad actum ipsius essentiae in habentem, qui est esse; sed ipsa essentia dat esse habenti: et iste actus est quasi actus primus. Egreditur etiam ab essentia alius actus, qui est etiam actus habentis essentiam sicut agentis, et essentiae sicut principii agendi: et iste est actus secundus, et dicitur operatio  » Saint Thomas d’AquinDe Veritate, q. 27, a. 1, ad 3.

« Poichè l’attualità di ogni accidente procede e dipende continuamente dall’attualità della sostanza e questa procede e dipende continuamente dalla immanenza operativa di Dio, necessariamente anche l’azione, accidente dinamico della creatura, si fonda nella continua e intrinseca attività creatrice di Dio ». A. Piolanti, Dio nel mondo e nell’uomo, Rome, LEV, 1994, p. 131.

[6] « Alors puisque l’être réel de l’essence et de ses principes substantiels et accidentels est en vertu de l’esse participé, et ce dernier, à son tour est en acte par la participation de l’Esse subsistens (création et conservation), à la même manière l’agir de la créature, ou son passage à l’acte, la “ vibration ” de ses principes opératifs, se fait en vertu de la vibration intime, et radicale de l’acte d’esse et par conséquent, en dernière instance en vertu de la vibration intime, profonde, immédiate, efficace… exercée et produite dans l’acte d’esse de l’être par participation, par Dieu, qui est l’Esse par essence. Ceci nous fait comprendre que le mode propre par lequel Dieu atteint, et par la suite, meut la créature, est le mode “ constitutif ” ou fondant de l’être et de l’agir, c’est-a-dire celui de la “ causa efficiens et conservans ”. » C. Fabro, Ibid.,  p. 408.

[7] « Deus movet voluntatem hominis, sicut universalis motor, ad universale obiectum voluntatis, quod est bonum. Et sine hac universali motione homo non potest aliquid velle. » Saint Thomas d’Aquin, Ibid.,  Ia-IIae, q. 9, a. 6, ad 3.

[8] « Ora non ripugna attribuire a Dio il peccato come azione fisica, anzi è necessario attribuirglielo, perchè ogni azione metafisicamente è atto, perfezione, e perciò non può trovare la sua ragion d’essere esclusivamente nella creatura, che è potenza ». P. Parente, Ibid. p. 543.

[9] « Oportet ergo quod malum, quod universaliter opponitur bono, opponatur etiam ei quod est esse. Quod autem est oppositum ei quod est esse, non potest esse aliquid. » Saint Thomas d’Aquin, De malo, q. 1, a. 1, co.

« Essendo il male opposto al bene, che è ente (essenza ed essere), non può equivalere a una natura o forma ossia ad un ente, ma a qualche cosa che si oppone all’ente (natura ed essere) e quindi è come una privazione di natura e di essere » P. Parente, Ibid., p. 529.

[10] « Cum autem malum, ut supra dictum est, nihil aliud sit quam privatio debitae perfectionis; privatio autem non sit nisi in ente in potentia, quia hoc privari dicimus quod natum est habere aliquid et non habet; sequitur quod malum sit in bono, secundum quod ens in potentia dicitur bonum. » Saint Thomas d’Aquin,  Ibid. a. 2, co.

 « Privatio autem et forma privata in eodem subjecto sunt ». Saint Thomas d’Aquin, Contra Gentes, III, c. 11.

[11] « Malum, sicut supra dictum est, est privatio boni, quod in perfectione et actu consistit principaliter et per se. Actus autem est duplex, primus, et secundus. Actus quidem primus est forma et integritas rei, actus autem secundus est operatio. Contingit ergo malum esse dupliciter. Uno modo, per subtractionem formae, aut alicuius partis, quae requiritur ad integritatem rei ; sicut caecitas malum est, et carere membro. Alio modo, per subtractionem debitae operationis ; vel quia omnino non est ; vel quia debitum modum et ordinem non habet. » Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, Ia, q. 48, a. 5.

[12] « Et hoc ideo est quia, cum bonum simpliciter consistat in actu, et non in potentia, ultimus autem actus est operatio, vel usus quarumcumque rerum habitarum; bonum hominis simpliciter consideratur in bona operatione, vel bono usu rerum habitarum. Utimur autem rebus omnibus per voluntatem. » Ibid, a. 6, co.

« Duplex est perfectio ; scilicet prima, et secunda : prima perfectio est forma uniuscuiusque, per quam habet esse ; unde ab ea nulla res destituitur dum manet ; secunda perfectio est operatio, quae est finis rei, vel id per quod ad finem devenitur et hac perfectione interdum res destituitur. » Saint Thomas d’AquinDe Veritate, q. 1, a. 10, ad s.c. 3.

[13]«  Primo quidem, quia illud quod per se causam habet, est intentum a sua causa; quod enim provenit praeter intentionem agentis, non est effectus per se, sed per accidens. [...] Malum autem, in quantum huiusmodi, non potest esse intentum, nec aliquo modo volitum vel desideratum; quia omne appetibile habet rationem boni, cui opponitur malum in quantum huiusmodi. […] Secundo idem apparet, quia omnis effectus per se habet aliqualiter similitudinem suae causae, vel secundum eamdem rationem, sicut in agentibus univocis, vel secundum deficientem rationem, sicut in agentibus aequivocis; omnis enim causa agens agit secundum quod actu est, quod pertinet ad rationem boni. […] Tertio idem apparet ex hoc quod omnis causa per se, habet certum et determinatum ordinem ad suum effectum; quod autem fit secundum ordinem non est malum, sed malum accidit in praetermittendo ordinem. Unde malum, secundum quod huiusmodi, non habet causam per se. » Saint Thomas d’Aquin, De Malo, q. 1, a. 3, co.

[14] « La causa finale è nell’ordine intenzionale la prima delle cause ; metafisicamente si definisce come “ciò in funzione di cui […] si partecipa l’essere.” Il partecipante, nella sua integrità ontica, è teso tutto verso il partecipato, in cui ha ragione totale del suo essere : il suo dinamismo dice essenziale intezionalità verso il partecipato. Da esso esce in qualche modo, attraverso la finalità. È l’exitus rerum a Deo e il reditus rerum in Deum » A. Piolanti, Ibid., p. 583.

[15] « Peccatum enim, prout nunc de peccato loquimur, consistit in aversione voluntatis creatae ab ultimo fine. Impossibile est autem quod Deus faciat voluntatem alicuius ab ultimo fine averti, cum ipsemet sit ultimus finis. » Saint Thomas d’Aquin Ibid., a. 1, co.

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Hommage à Notre Dame de Fatima et aux premiers samedis du mois

par Disputationes theologicae

Vigilate et orate, invitation à ne pas manquer une opportunité...
 
31 mai 2017, Fête de Marie Reine
 

 
L’Eglise est en train de traverser son Vendredi Saint, elle est face à une situation qui n’a quasiment rien d’ordinaire et comme on dit: à situations extraordinaires, remèdes extraordinaires. Au jardin de Gethsémani Jésus invite à la vigilance et à la prière (“vigilate et orate”, Mt 26,41). Par le travail de cette revue nous cherchons à stimuler la vigilance, spécialement en ce qui regarde les erreurs sur la foi et sur la morale, mais aussi sur certains choix ecclésiaux discutables. Nous voudrions que ces lignes aident aussi à diffuser les invitations du Ciel à intensifier la prière réparatrice et surtout la dévotion aux cinq premiers samedis du mois. Nous demandons aussi au Seigneur qu’Il délivre les coeurs de l’orgueil du rationalisme (pseudo) intellectualiste qui dédaigne les actes de dévotion.
 
Il est notoire que Soeur Lucie de Fatima diffusa et demanda de diffuser cette pieuse pratique par tous les moyens. Nous nous unissons à cette oeuvre de diffusion demandée par la Sainte Vierge, invitant tout le monde à ne pas gâcher une opportunité si généreusement donnée par le Ciel, et qui tout en apaisant la colère divine pour les offenses commises, nous garantit l’assistance de Marie à notre dernière heure, avant le Jugement Eternel.
 
La Communauté Saint Grégoire le Grand commencera un cycle du mois de juin jusqu’au mois d’octobre dans la maison de Camerino (pour plus d’informations écrire à:
 
Association de Clercs Saint Grégoire le Grand
 
 
 
Quelques indications pratiques pour accomplir la requête des cinq premiers samedis du mois
 
1) Recevoir la Sainte Communion pendant les cinq premiers samedis du mois à la suite (pour des raisons justifiées on peut demander au prêtre de reporter cela au premier dimanche du mois).
 
2) Se confesser. Il est possible de le faire dans l’intervalle de huit jours avant ou huit jours après le premier samedi, pourvu que la Communion soit reçue en état de grâce.
 
3) Récitation du Très Saint Rosaire (par Rosaire on entend les cinq mystères d’un chapelet).
 
4) Une méditation de quinze minutes sur les mystères du Rosaire. La méditation demandée est quelque chose de simple, accessible à tous, sur un ou plusieurs mystères du Rosaire. Plus bas nous donnons quelques indications et orientations données par Soeur Lucie elle-même.
 
 
La Communion et la Confession doivent être offertes en réparation pour les offenses qui outragent la Très Sainte Vierge Marie:
 
“Ma fille, le motif (du chiffre cinq) est simple. Il y a cinq sortes d’offenses et de blasphèmes proférés contre le Coeur Immaculé de Marie :
 
1) les blasphèmes contre l’Immaculée Conception;
 
2) les blasphèmes contre Sa Virginité;
 
3) les blasphèmes contre Sa Maternité divine, refusant en même temps aussi de La reconnaitre comme Mère des hommes;
 
4) les blasphèmes de ceux qui cherchent publiquement à infuser dans le coeur des enfants l’indifférence, le mépris ou encore la haine contre tout ce qui concerne cette Mère Immaculée;
 
5) les offenses de ceux qui l’outragent directement dans Ses saintes images.
 
 
Le 10 décembre 1925, la Très Sainte Vierge apparut à Soeur Lucie avec l’Enfant Jésus. Ce dernier déclara:
 
“Aie compassion du Coeur de ta Très Sainte Mère entouré d’épines que les hommes ingrats Lui enfoncent à tout moment, sans qu’il n’y ait personne qui fasse un acte de réparation pour les enlever”.
 
La Très Sainte Vierge ajouta:
 
“Toi, au moins, cherche à me consoler et dis à tous ceux qui, durant cinq mois consécutifs, le premier samedi, se confesseront et recevront la Sainte Communion, réciteront un rosaire et me tiendront compagnie pendant quinze minutes, méditant sur les quinze mystères du Rosaire, en esprit de réparation, que je promets de les assister à l’heure de leur mort par toutes les grâces nécessaires pour le salut de leur âme”.
 

 
Appendice sur les quinze minutes de médiation requises
 
La pratique de ce bref moment de méditation est à prendre avec la même simplicité que la Très Sainte Vierge utilise - “et me tiendront compagnie pendant quinze minutes, méditant sur les quinze mystères du Rosaire” - on peut s’arrêter sur un ou plusieurs des mystères, selon la facilité de chacun, sans oublier le “tenir compagnie” dans un esprit de réparation. Par exemple concernant le mystère de l’Annonciation, Soeur Lucie, sans que cela soit l’unique méthode, méditait ainsi:
 
“Voici mon mode de méditer sur les mystères du Rosaire durant les premiers samedis du mois : Premier Mystère, l’Annonciation de l’Ange Gabriel à Marie.
 
Premier Prélude: imaginer qu’on est en train d’observer et écouter l’Ange qui salue la Très Sainte Vierge par ces paroles : “Je vous salue Marie pleine de grâce”.
 
Second Prélude: je demande à la Très Sainte Vierge Marie de remplir mon âme d’un profond sentiment d’humilité.
 
Premier point: je méditerai sur le mode par lequel le Ciel proclame la Très Sainte Vierge Marie pleine de grâce, bénie entre toutes les femmes et destinée à devenir la Mère de Dieu.
 
Second point: l’humilité de la Très Sainte Vierge, se reconnaissant Elle-même et se proclamant Elle-même la servante du Seigneur.
 
Troisième point: Comment dois-je imiter la Très Sainte Vierge, dans Son humilité; quelles sont les erreurs d’orgueil de jugement téméraire à cause des quelles j’offense plus spécialement le Seigneur, et les modes par les lesquels je peux chercher à les éviter, etc...
 
Le deuxième mois, je médite sur le second mystère joyeux. Le troisième mois, sur le troisième mystère joyeux, et ainsi de suite, en suivant la même méthode de méditation. Quand j’ai fini les Cinq Premiers Samedis, j’en recommence cinq autres et je médite sur les mystères douloureux, puis les mystères glorieux, et quand j’ai fini je recommence avec les mystères joyeux.”

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Est-il immoral d’aider les étrangers plus que ses compatriotes?

par Disputationes theologicae

Saint Thomas d’Aquin sur le devoir d’aider ceux qui nous sont proches

30 avril 2017, Sainte Catherine de Sienne

Sainte Elisabeth de Hongrie aide ses compatriotes

 

Dans l’article publié ces derniers mois (Immigration et ordre dans la charité, laccueil” désordonné des migrants est la négation de l'amour de Dieu) nous avons abordé la question de l’ordre dans l'exercice de la charité, nous référant particulièrement au problème de l’immigration, y compris de l’immigration islamique, surtout par rapport au bien commun de la société naturelle et surnaturelle. Cet article, en étroite relation avec le précèdent, dont il est un développement, veut offrir des commentaires des passages de Saint Thomas qui décrivent l’exercice de la charité surtout par rapport au problème de savoir s’il est juste ou non de s’occuper d’abord de ses propres compatriotes plutôt que des étrangers. Y a-t-il matière à pécher et même à pécher de manière grave lorsqu’un étranger est traité de la même manière qu’un membre de notre famille, de notre nation ou même qu’un compagnon d’armes ? Nous verrons la réponse de Saint Thomas d’Aquin en restant dans le sillage de la question 26 de la Secunda Secundae de la Summa Theologiae.

 

Saint Thomas aborde le problème par un argument tiré de Saint Augustin et qui contient déjà in nuce la réponse qu’il développera par la suite. En effet, d’un côté il semblerait qu’il faille aider tous les hommes de manière égale, mais d’un autre côté, il n’est pas possible d’aider tout le monde et il faut tenir compte du fait que nous sommes unis à certains par des circonstances de temps et de lieu, ou pour d'autres motifs, presque comme si “le sort” nous les avait confiés, dit l’Evêque d’Hippone[1].

 

D’un côté en effet, il est vrai que la raison d’un tel amour envers les hommes étant Dieu, elle a une égale nature pour tous et il est aussi vrai que le bien que nous désirons pour chaque homme est le bien suprême de la vie éternelle dont la nature est la même pour tous. Mais il n’en découle pas le devoir pour chacun d’entre nous d’aimer également tout le monde, parce que l’exercice de la charité est à ordonner aussi en relation à la situation spécifique et concrète de chacun. Nous devons donc avoir envers tous sans distinction, l’amour que Saint Thomas appelle “amour de bienveillance”, qui, littéralement veut dire vouloir le bien pour tous les hommes. Cependant ne pouvant pas faire du bien à tous, nous devrons être inégaux dans l’ “amour de bienfaisance” (mot à prendre dans le sens le plus large du terme bene facere)[2]. C’est-à-dire que, sans exclure positivement personne de notre amour de bienveillance, selon lequel nous désirons pour chacun le bien suprême et éternel, nous devons aimer de manière différenciée le prochain quant à la bienfaisance. Cet amour de bienfaisance aura une intensité différente selon que le prochain sera plus ou moins lié à nous selon diverses circonstances.

 

Saint Thomas dit donc avec clarté que pèche bien plus gravement celui qui refuse son amour à une personne qui lui est objectivement plus proche et qu’il devrait aimer que celui qui refuse son amour à une personne lointaine. Et pour appuyer et expliquer une telle assertion il cite les paroles du Lévitique : “quiconque maudira son père et sa mère qu’il soit mis à mort[3]. Peine de mort qui n’est pas prévue pour celui qui maudit un autre que son père et sa mère. Il est bien plus grave pour un fils d’éprouver de la haine pour ses propres parents, que d’éprouver de la haine pour une personne quelconque. Il s’en suit évidemment que nous devons aimer d’avantage certains de nos proches plutôt que d’autres, en raison du lien objectif et inégal qui nous unit à eux, lien qui ne peut pas être établi ni par notre choix ni par l’égalitarisme à la mode.

 

Saint Thomas spécifie donc que, s’il est vrai que par rapport à la nature du bien surnaturel que nous voulons pour tous il n’y a pas de différence, pour tous en effet nous devons vouloir la béatitude éternelle, il est aussi vrai qu’il y a une intensité différente dans l’amour de charité et dans la bienfaisance que nous devons prodiguer au prochain, cette différente intensité nait de la plus ou moins grande proximité de la personne à aimer. Saint Paul dit que si quelqu’un ne prend pas soin des personnes de sa propre famille il est pire que l’infidèle (1 Tim 5,8). La dilection interne de la charité, avec ce qu’elle comporte d'extérieur, doit s’exercer d’abord envers celui qui nous est plus proche[4]. Chacun de nous doit “proportionner” l’amour de charité à ce qu’il est, à la situation dans laquelle la Providence l’a mis, à la famille dans laquelle Dieu l’a fait naître, à la patrie dans laquelle il a grandi. D’où le devoir primaire d’aimer de charité plus intense ceux qui nous sont plus proches; si à tous nous devons l’amour de charité de manière indistincte, à certains, en raison d’un autre amour d’amitié (au sens le plus large du terme) qui nous lie à eux, nous devons un amour de charité plus grand[5]. Et c’est ainsi que l’ordre même de la charité nous “commande” d’aimer davantage d’abord nos consanguins, ensuite ceux auxquels nous sommes liés pour d’autres raisons et Saint Thomas cite, tout de suite après les membres de la famille, les concitoyens[6].

 

On pourrait dire que sur les proches, sur les membres de la famille, sur les concitoyens nous avons d’une certaine façon un “mandat divin d’amour”, presqu’une responsabilité sur eux, qui nous vient de l’ordre voulu par Dieu Créateur, sur lequel l’ordre surnaturel se greffe.

 

Nous devons avoir une plus grande charité pour ceux qui nous sont unis par le sang, soit parce que l’amour que nous leur portons est plus intense, soit parce que nous les aimons sous un plus grand nombre de rapports[7], Saint Thomas est en train de nous expliquer que selon le type de lien qui nous unit nous sommes tenus à une dilection particulière et ordonnée envers certains avant d’autres. Par exemple, en ce qui regarde notre origine naturelle nous devons aimer principalement les consanguins, en ce qui regarde les relations sociales nous devons aimer principalement nos concitoyens et en ce qui regarde la guerre notre dilection doit aller d’abord vers nos compagnons d’armes[8]. Par exemple, dans la distribution des ressources familières, dit le Saint Docteur en commentant Saint Ambroise, un père est tenu de nourrir ses propres enfants naturels plutôt que d’éventuels fils spirituels[9]. C’est l’ordre des choses, que l’ordre surnaturel ne va pas bouleverser mais perfectionner. De façon analogue donc on doit dire du devoir des citoyens et des gouvernants, lesquels in primis doivent s’occuper des citoyens de leur propre Civitas avant de s’occuper de ceux des autres villes. Et un tel amour de charité doit s’adresser plus intensément aux concitoyens justement par rapport aux choses qui regardent la vie civile, dit Saint Thomas, c’est-à-dire que le soutien dérivant de l’intervention publique, par exemple, doit respecter cette plus grande intensité qui comporte inégalité d’amour et de traitement entre les compatriotes et les étrangers. Ainsi seulement l’intervention civique pourra être vraiment juste et surtout vraiment charitable.

 

A la lumière de l’enseignement de Saint Thomas d’Aquin, affirmer que les étrangers doivent être aimés et aidés de manière égale par rapport aux concitoyens ne paraît pas conforme à la doctrine catholique sur la charité. Elever à la dignité de principe le devoir de traiter de manière égalitaire, tant dans le milieu familial que dans celui de la Civitas, ses propres enfants comme les enfants des autres, ses propres concitoyens comme les étrangers, les fils de l’Eglise comme les infidèles musulmans, non seulement n’est pas conforme au droit naturel mais apparait aussi en contradiction avec la Divine Révélation et la Tradition catholique qui nous enseignent la charité ordonnée.

 

Don Stefano Carusi

 

 

P.S.: Saint Thomas offre une dernière considération dans la question 26 sur la charité, citée plus haut, à propos de la bienfaisance trop facile et du rapport entre bienfaiteur et bénéficiaire: “nous aimons d’avantage les choses que nous obtenons au prix d’un effort, celles par contre qui nous arrivent facilement, d’une certaine façon nous les méprisons”[10]. On pourrait en tirer un dernier avertissement indirect de l’Aquinate en matière de charité ordonnée: les aides excessives, complètement gratuites et de plus souvent souverainement injustes, parce que donnés en enlevant ce qui est dû à ses propres enfants ou à ses propres concitoyens au bénéfice de ceux qui sont loin ou des étrangers, parfois même ouvertement hostiles à la nation qui les accueille, peuvent engendrer aussi le mépris de celui qui reçoit les bénéfices et se retourner gravement contre les sociétés qui ont renié non seulement la justice, mais aussi l’ordre qui nous est offert par la foi et la charité.

 

 

 

[1] Saint Thomas d’Aquin, S. Th., IIa IIae, q. 26, a. 6, arg. 1: “Dicit enim Augustinus, in I de Doct. Christ., omnes homines aeque diligendi sunt. Sed cum omnibus prodesse non possis, his potissimum consulendum est qui pro locorum et temporum vel quarumlibet rerum opportunitatibus, constrictius tibi quasi quadam sorte iunguntur”.

[2] Ibidem, ad 1: “Ad primum ergo dicendum quod dilectio potest esse inaequalis dupliciter. Uno modo, ex parte eius boni quod amico optamus. Et quantum ad hoc, omnes homines aeque diligimus ex caritate, quia omnibus optamus bonum idem in genere, scilicet beatitudinem aeternam. Alio modo dicitur maior dilectio propter intensiorem actum dilectionis. Et sic non oportet omnes aeque diligere. Vel aliter dicendum quod dilectio inaequaliter potest ad aliquos haberi dupliciter. Uno modo, ex eo quod quidam diliguntur et alii non diliguntur. Et hanc inaequalitatem oportet servare in beneficentia, quia non possumus omnibus prodesse, sed in benevolentia dilectionis talis inaequalitas haberi non debet. Alia vero est inaequalitas dilectionis ex hoc quod quidam plus aliis diliguntur. Augustinus ergo non intendit hanc excludere inaequalitatem, sed primam, ut patet ex his quae de beneficentia dicit”.

[3] Ibidem, s.c.: “Sed contra est quod tanto unusquisque magis debet diligi, quanto gravius peccat qui contra eius dilectionem operatur. Sed gravius peccat qui agit contra dilectionem aliquorum proximorum quam qui agit contra dilectionem aliorum, unde Levit. XX praecipitur quod qui maledixerit patri aut matri, morte moriatur, quod non praecipitur de his qui alios homines maledicunt. Ergo quosdam proximorum magis debemus diligere quam alios”.

[4] Ibidem, a. 7, s.c.: “Sed contra est quod dicitur I ad Tim. V, si quis suorum, et maxime domesticorum curam non habet, fidem negavit et est infideli deterior. Sed interior caritatis affectio debet respondere exteriori effectui. Ergo caritas magis debet haberi ad propinquiores quam ad meliores”. Ibidem, corpus.

[5] Ibidem, corpus: “Sed intensio dilectionis est attendenda per comparationem ad ipsum hominem qui diligit. Et secundum hoc illos qui sunt sibi propinquiores intensiori affectu diligit homo ad illud bonum ad quod eos diligit, quam meliores ad maius bonum. Est etiam ibi et alia differentia attendenda. Nam aliqui proximi sunt propinqui nobis secundum naturalem originem, a qua discedere non possunt, quia secundum eam sunt id quod sunt”.

[6] Ibidem, corpus: “Et sic hoc ipsum quod est diligere aliquem quia consanguineus vel quia coniunctus est vel concivis, vel propter quodcumque huiusmodi aliud licitum ordinabile in finem caritatis, potest a caritate imperari. Et ita ex caritate eliciente cum imperante pluribus modis diligimus magis nobis coniunctos”.

[7] Ibidem, a. 8, corpus.

[8] Ibidem: “Sic igitur dicendum est quod amicitia consanguineorum fundatur in coniunctione naturalis originis; amicitia autem concivium in communicatione civili; et amicitia commilitantium in communicatione bellica. Et ideo in his quae pertinent ad naturam plus debemus diligere consanguineos; in his autem quae pertinent ad civilem conversationem plus debemus diligere concives; et in bellicis plus commilitones”.

[9] Ibidem, ad 2.

[10] Ibidem, a. 12, corpus.

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Mgr Pozzo répond à notre lettre ouverte

par Disputationes theologicae

La critique constructive est légitime. Mais...

22 février 2017, Chaire de Saint Pierre

 

 

Mgr Guido Pozzo

Archevêque titulaire de Bagnoregio

Secrétaire de la Commission Pontificale

“Ecclesia Dei”

 

Du Vatican, 27 janvier 2017

 

Chère Rédaction

En référence à Votre lettre du 15 janvier 2016, je n’ai pas de difficulté à répondre qu’il n’y a aucun contraste entre ce que j’ai exposé dans ma conférence du 4 avril 2014 dans le siège de l’Institut du Bon Pasteur et ce que j’ai déclaré à Zenit dans l’interview mentionnée. Dans ladite conférence j’ai proposé, entre autres, certaines considérations et réflexions visant à clarifier et préciser l’enseignement de Vatican II sur la liberté religieuse et à propos du caractère pastoral du Concile Vatican II. Il n’y a donc aucune limitation à discuter, examiner, approfondir et clarifier des matières concernant le rapport Eglise et Etat en matière de liberté religieuse, des questions œcuméniques ou relatives au dialogue inter-religieux. Mon intention lors de cette rencontre était justement celle de porter une contribution à la clarification et à la nécessaire précision de certains thèmes, surtout compte-tenu des indications du Pape Benoit XVI, non pas donc pour fermer le discours, mais pour l’orienter dans le sens correct, c’est-à-dire non en contraste avec l'enseignement du Magistère constant de l’Eglise, mais dans la ligne du développement cohérent et de l’explicitation.

Cependant, l’essentiel est ce que Mgr Fellay lui-même a déclaré dans un interview de l’année dernière : “nous pouvons exposer le problème et voir les ambiguïtés, mais c’est justement Rome qui a l’autorité pour éclaircir”. Je crois que cela vaut pour la FSSPX comme pour les autres.

En vous communiquant ce qui précède, avec mon respect distingué.

+ Guido Pozzo

Archevêque tit. de Bagnoregio

 

***

 

Nous remercions Son Excellence Mgr Pozzo pour cette lettre (ici l’original), nous adhérons certainement à ce que Mgr Fellay a déclaré à cette occasion et que Mgr Pozzo pose comme pilier: “nous pouvons exposer le problème et voir les ambiguïtés, mais c’est justement Rome qui a l’autorité pour éclaircir”. Nous ajoutons que, si la vérité historique vaut quelque chose, ce pilier est depuis toujours constitutif de notre position. Mais, sans reprendre au début ce que nous avons déjà exposé, la question qui demeure est double. Quant à Mgr Fellay, qui proclamait la nécessité absolue d'éclaircir et corriger les principes de la crise de manière préliminaire à n’importe quel accord: un tel éclaircissement a-t-il été fait ou est-il encore à faire ? Et quant à l’ouverture de principe contenue dans la réponse de Mgr Pozzo, le tout est de voir - au-de-là des intentions personnelles - comment elle se concrétise. Ce seront aussi les faits qui apporteront cet éclaircissement.

 

La Rédaction de Disputationes Theologicae

Association de clercs Saint Grégoire le Grand

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Le bâillon ou le bâton?

par Disputationes theologicae

De manière biaisée…

11 février 2017, Fête de Notre Dame de Lourdes

 

Saint Grégoire le Grand: “L’Eglise préfère mourir que se taire

 

Cela doit être un effet de la Nouvelle Miséricorde, mais des perspectives de bouts de sanctions en provenance de la Curie Romaine (qui serait en grande réforme) parviennent même jusqu'à nos “périphéries” dévastées par le tremblement de terre.

Ces procédures, ces éventuelles punitions s’ajoutent aux menaces dont nous avons déjà parlé. On remarquera bien qu’à plusieurs reprises elles ont fait suite à des questions “gênantes ” posées ici même.

Nous verrons les développements plus tard, en nous remettant aux dispositions et aux signes de la Providence. En plus des susdites concomitances réitérées, nous faisons remarquer que d’une certaine manière cela pourrait nous attrister. Et le fait de dire à propos de ces choses « cela ne nous importe pas, nous ne demandons pas, nous refusons par principe », nous semblerait incliner (si cela était dit sincèrement) vers l’esprit schismatique et ne pas être conforme à l’esprit catholique. Naturellement, le pragmatisme ne permet pas de saisir grand chose à ces distinctions; mais le pragmatisme (même lorsqu’il se mélange à l’idéologisme) relève non pas de la pensée catholique, mais de la pensée libérale.

D’autre part, nous ne pouvons pas en conscience accepter la logique de renoncer à parler, même de vérités gênantes, de peur de prendre des coups de bâton de manière biaisée. Se taire ainsi ne serait pas un silence choisi en conscience, un silence dérivant de nouvelles circonstances, mais cela serait – même en apportant toutes les excuses possibles – une façon opportuniste de se conformer. Les effets néfastes, directs et collatéraux, d'un tel comportement sont largement illustrés par l’histoire, et aussi dans cette revue.

Nous entendons donc continuer à nous soutenir réciproquement, à nous dédier à la prière (activité particulièrement importante en ces temps de grandes tribulations), mais aussi à faire des études et à poursuivre cette critique constructive qui en 2006 était - selon les mots d’un Cardinal et (pauvre “continuité”) au nom du Souverain Pontife - un précieux service à rendre à l’Eglise.

« Parlez Seigneur, Votre serviteur Vous écoute »

 

La Rédaction de Disputationes Theologicae

Association de clercs “Saint Grégoire le Grand

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Lettre ouverte à Mgr Pozzo

par Disputationes theologicae

31 janvier 2017, Saint Jean Bosco

 

A Son Excellence Révérendissime Mgr Guido Pozzo

Commission Pontificale “Ecclesia Dei

 

Camerino, 15 janvier 2017, Saint Paul Ermite

 

Excellence Révérendissime,

comme anticipé par cette revue le 3 septembre dernier, nous nous adressons à Votre Excellence, par la présente lettre ouverte, dans l’esprit de cette “parrêsia” que nous entendons tellement louer, même in alto loco. Dans l’interview à Zénit du 8 avril 2016 Votre Excellence affirmait à propos d’un accord envisagé avec la FSSPX: “Les difficultés soulevées par la FSSPX au sujet des questions de la relation Eglise-Etat et de la liberté religieuse, de la pratique de l’œcuménisme et du dialogue avec les religions non chrétiennes, de certains aspects de la réforme liturgique et de son application concrète, demeurent objet de discussion et de clarification, mais ne constituent pas un obstacle pour la reconnaissance canonique et juridique de la FSSPX”.

Cependant, à l’IBP, Votre Excellence avait adressé des requêtes considérables, ou en avait donné l’idée, qui ne sont pas en harmonie évidente avec de telles ouvertures, cf. le fameux Document Pozzo adressé à l’Institut du Bon Pasteur le 23 mars 2012 (document confidentiel, mais désormais public dans les faits) et Vos conférences à ce même Institut du 4 avril 2014, dont il avait été demandé que le contenu soit assimilé au Séminaire par les séminaristes et les professeurs: “Le Concile Vatican II: renouveau dans la continuité avec la Tradition et “Sacerdoce ministériel, liturgie et autres questions particulières”. Les deux conférences avaient été reprises par Disputationes Theologicae le 15 novembre 2014. Donc, dans un souci de clarification, nous posons la question à Votre Excellence: de telles requêtes adressées l’IBP, face auxquelles, nous, de Disputationes Theologicae et de l’Association de Clercs Saint Grégoire le Grand, avons cherché à être respectueux et constructifs, mais que nous ne nous sentons pas de faire pleinement nôtres dans la situation actuelle, valent-elles aussi pour l’accord proposé à la FSSPX ? En cas de réponse négative: pourquoi ?

Nous nous inclinons pour embrasser l’Anneau Sacré.

 

La Rédaction de Disputationes Theologicae

L’Association de Clercs Saint Grégoire le Grand

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Immigration et ordre dans la charité

par Disputationes theologicae

L' accueil désordonné des migrants est la négation de l'amour de Dieu

 

21 décembre 2016, Saint Thomas Apôtre

 

Raphaël, Saint Léon le Grand, avec Saints Pierre et Paul, arrête les Huns

 

L'obligation d'accueillir l'étranger à n'importe quel prix même contre le bien commun. Voilà le nouveau dogme, non révélé par Dieu, mais propagé presque sans distinction par tous les centrales du pouvoir maçonnique. Il est évident qu'un cœur chrétien, s'il le peut, prête secours à celui qui se trouve en grave difficulté, mais la religion de l'homme - qui semble désormais avoir conquis la presque totalité des bastions catholiques - impose celui de l'accueil comme un impératif catégorique auquel on ne peut qu’obéir. Il n'est presque pas licite de réfléchir aux circonstances et à l'opportunité de certaines actions présentées officiellement comme charitables, et cela sous peine d’excommunication médiatique. Nolite cogitare.

Le désarroi en plus est alimenté par les déclarations de certaines autorités ecclésiastiques qui souvent propagent la confusion, en prêchant comme doctrine catholique des concepts qui semblent plutôt l’aboutissement du pire mondialisme que la doctrine de Jésus-Christ.

Le genre de l’immigration actuelle soulève certes plusieurs questions qui portent sur différents sujets, à commencer par un discernement sérieux concernant la nature de ces flux jusqu’au devoir d’aide envers nos frères, in primis les chrétiens d’Orient. La question de la nécessité pour certaines réalités précises, d’un possible soutien in loco, même militaire, se pose ainsi que celle de l’évaluation sérieuse de la présence parmi les immigrés de plusieurs loups déguisés en agneaux.

L’importance fondamentale de la notion de souveraineté face à ce qui semble être une vraie et propre immigration de substitution ne doit pas non plus être oubliée.

Ces interrogations suscitent plusieurs perspectives d’analyse. On peut traiter la question sous l’angle de l’invasion masquée (plus ou moins islamiste et plus ou moins violente). Cette perspective impose une analyse sur la licéité du recours à la force pour repousser la violence et implique même la question de la guerre juste. Une autre perspective conduit à considérer que la question ne doit être envisagée que sous l’angle de ce qu’on appelle aujourd’hui avec emphase accueil et que l'on voudrait être une émanation de la charité chrétienne.

Nous concentrerons l'attention de cet article sur ce dernier point, sans exclure de traiter du juste recours à la force dans une prochaine intervention. En effet, il paraît urgent de faire d'abord la clarté sur un point parmi les plus exposés à la contrefaçon : l'exercice (ordonné) de la charité chrétienne.

Après une brève suggestion de bon sens aux gouvernants, tirée de la réflexion scholastique, nous parcourrons rapidement certaines indications sur l'exercice de la charité ordonnée données par Saint Thomas d'Aquin dans la Summa Theologiae, particulièrement dans la question 26 de la Secunda Secundae, pour chercher à en tirer quelques conclusions, même d'ordre pratique. Quel est en effet l'exercice de la vraie charité en matière d’immigration ?

 

La présence d'étrangers dans la patrie, une simple réflexion à la suite d'Aristote

Avant d'entrer dans le domaine de la vertu surnaturelle et particulièrement de la charité ordonnée il est utile de rappeler un bref passage du De Regno, qui a le mérite d'éclaircir en peu de lignes la problématique au point de vue naturel. Au XIIIème siècle, la question des étrangers, quoique non différente dans la substance, se posait sous une autre forme et Saint Thomas dans l'opuscule cité, en conseillant les gouvernants, donne des indications au Roi sur la façon de se comporter par rapport à la présence d'étrangers, personnifiés principalement à l’époque par les commerçants. La question de fond étant de savoir si la multitude d'étrangers est un bien ou un mal pour la Civitas[i].

La réponse de l'auteur se fonde, en suivant Aristote, sur la nécessaire unité du corps social, à l’imitation du corps physique. On déconseille donc vivement aux gouvernants de favoriser une présence de marchands étrangers dans la ville pour un motif très simple : leurs usages différents, quoique légitimes dans leur patrie, déstabilisent la société. Ils compromettent l'unité de la Civitas, qui fonde sa propre unité et son propre bien-être spirituel et temporel sur un patrimoine commun. Les étrangers ne partagent pas cet ensemble de traditions identitaires qui sont le ciment de l'état et qui contribuent à donner une direction claire et partagée par tous vers le bien commun que tous recherchent. Le citoyen de longue tradition partage avec ses concitoyens ce mode particulier de connaître et d'aimer sa propre Civitas, et cela s'accomplit non pas d'une façon artificielle, par des projets d'intégration autant cérébraux qu’utopiques, mais d'une façon tellement naturelle que ce patrimoine commun ne nécessite aucune explication, tant il est enraciné dans les cœurs.

Cela ne signifie pas que pour des raisons par exemple commerciales un étranger ne puisse pas traverser la ville ou même y demeurer longtemps, jusqu'à en devenir un membre vital. Et même, sa présence peut dans une certaine mesure constituer un bien objectif et appréciable pour la Civitas, que l'on pense aux Maîtres de Côme du Moyen-Age qui coupaient si bien la pierre qu'ils ont rempli l’Italie de chefs d’œuvre, en formant partout où ils allaient des petites communautés lombardes, qui par la suite se sont amalgamées au tissu préexistant. Mais le nombre doit être contenu, parce que le bien de la société entière est supérieur au bien d'un seul ou d'un groupe de citoyens ou d'un seul ou plusieurs étrangers.

En effet, le vrai bien de chacun s'articule avec le vrai bien commun et jamais il ne peut être en opposition avec ce dernier. En suivant l'analogie entre le bien du corps humain et le bien du corps social, il est clair que le maintien en santé de la personne entière est supérieur au bien d'un seul membre. Dans certains cas il peut donc être nécessaire d’amputer, à plus forte raison dans le cas d'un élément étranger qui n'est pas encore organiquement uni à la personne. En effet, l'étranger n'est pas encore membre du corps social, et ne le devient que suite à un long processus nécessitant entre autres l'acceptation des conditions posées par la Civitas qui choisit de l'accueillir ou pas. Donc son bien est toujours soumis et doit toujours s'articuler au bien de toute la ville. Sinon, tout comme il est licite de couper du corps social l'élément nuisible, à plus forte raison est licite le refus d'un corps étranger qui altérerait la paix et l’ordre social.

Du point de vue du bien commun naturel, la nécessité de se prémunir contre l'arrivée excessive d'étrangers est un devoir du Prince et cela en raison de la nature même de l’homme. A cette considération il faut ajouter que ratione peccati, c'est-à-dire en considérant la nature humaine en tant que blessée par le péché originel, une telle nécessité se fait encore plus pressante. Et cela - même en voulant rester au point de vue strictement naturel - est particulièrement important lorsqu'on parle d'immigration d'étrangers de religion musulmane, compte tenu du caractère violemment agressif du Coran qui en est le fondement.

En mettant de côté les délires des idéologues multiethniques et multiraciaux et de ceux qui les suivent, on reconnaît généralement un certain fondement à ce qui a été exposé jusqu'à présent. Cependant, dans le milieu catholique surgit souvent l'objection - non dépourvue d'une bonne dose d'hypocrisie - que si un tel discours peut paraître raisonnable à l'intelligence dans l'ordre naturel, il n'est cependant pas admissible après l’avènement de la charité chrétienne, laquelle accepte tout, pardonne tout et…accueille tout.

 

Mais dans la charité aussi (et surtout) il y a un ordre établi par Dieu, Créateur et Législateur

Saint Thomas d'Aquin en parlant de la charité souligne qu'il est absolument nécessaire d'évaluer quel est l'ordre dans la charité[ii]. Dois-je aimer plus Dieu ou le prochain ? Dois-je aimer plus le prochain ou mon corps ? Dois-je aimer un proche plus qu'un autre ou tous de manière identique ? Dois-je aimer celui qui m'est plus proche (prochain veut dire proche…) ou dois-je aimer aussi les plus lointains d'une manière égale et identique ? Dois-je aimer davantage la paix (religieuse aussi) dans ma patrie ou dois-je accueillir n'importe quel étranger qui la menace au nom de la charité ?

Là où il y a une multiplicité, comme dans ce cas il y a une multiplicité d'objets à aimer, il faut un ordre et un ordre se fait par rapport à un principe. Par exemple, un ensemble de fruits peut être ordonné selon différents principes, selon la couleur, selon le poids, selon le parfum ; pour faire de l'ordre et savoir ce qu'il faut mettre avant et mettre après il faut un principe. Mais quel est dans la charité ce point ferme qui nous permet de mettre de l’ordre ? « L'amour de la charité tend vers Dieu en tant qu'il est source de béatitude[...]. Et donc il est nécessaire que dans les choses qui sont aimées par la charité on s'en tienne à un certain ordre, en relation au principe premier d'un tel amour, qui est Dieu »[iii].

La charité et son exercice s'ordonnent donc seulement par rapport à Dieu et non pas par rapport aux principes d’un anthropocentrisme mielleux.

Malheureusement aujourd'hui, une pensée non catholique a avancé partout, au point que pour l'homme moderne - qui marche au pas avec l'ecclésiastique moderniste - il faut aimer le prochain sans établir un ordre quelconque et cela parfois même...contre Dieu ou plus que Dieu. Ou sinon, lorsque le panthéisme a atteint des niveaux pathologiques, on arrive presque à l'affirmation explicite qui identifie le prochain avec Dieu presque métaphysiquement. A partir de là, aucun raisonnement - et aucun ordre dans la charité - n'est plus possible. Des phrases fréquentes comme par exemple « le pauvre est Dieu », quoique prononcées avec une intention rhétorique, alimentent - de façon non intentionnelle on voudrait l'espérer - une telle confusion. Car s'il est vrai que dans le visage du pauvre je dois voir l'empreinte de Dieu Créateur et l'action de Dieu Rédempteur, il est aussi vrai qu'une créature ne pourra jamais s'identifier avec le Créateur et l'amour qu'il faut porter à n'importe quelle créature ne sera jamais aussi inconditionné que l'amour qu'il faut porter à Dieu.

L'objet de l'acte de charité regarde donc principalement Dieu, secondairement les créatures, dans la mesure selon laquelle elles se réfèrent à Dieu. Cet ordre de la charité que nous recherchons donc - dit l'Angélique[iv] - se trouve dans les choses elles-mêmes, dans leur être par rapport à Dieu. C'est un ordre objectif. Le prochain ne doit pas être aimé inconditionnellement comme s'il était Dieu, la bonté du prochain n'est pas absolue, mais elle est « participative », elle participe de la bonté divine et d'une façon différente selon les cas. Il peut donc y avoir un plus et un moins dans l'échelle, parce que la mesure est donnée par la majeure ou mineure proximité à Dieu de la chose à aimer.

Il y a en effet un prochain à haïr par amour de Dieu, dit Notre Seigneur. « Si quelqu'un vient à moi et ne hait pas son père et sa mère et sa femme et ses enfants et ses frères et ses sœurs et aussi sa propre vie il ne peut pas être mon disciple » (Lc 14, 26). De telles paroles ne sont pas dures si on a compris l'ordre dans la charité. Saint Thomas dit « L'amitié de la charité se fonde sur la communication de la béatitude qui consiste essentiellement en Dieu comme dans son premier principe, d'où elle découle sur tous les êtres qui sont capables de béatitude » et il continue « donc c’est Dieu qu'il faut aimer principalement et par-dessus tout en charité […] le prochain en tant qu'il participe avec nous de cette béatitude qui vient de Lui »[v]. Donc lorsque Jésus-Christ nous dit « Si quelqu'un ne hait pas son père et sa mère... » il est en train de nous expliquer que celui qui aime le prochain dans un ordre qui n'est pas celui voulu par Dieu n'est pas son disciple et qu'il sera aussi nécessaire de haïr son propre frère dans la mesure où celui-ci éloigne Dieu de nous, de lui-même et des autres. Si une personne m’empêche d'aimer Dieu ou empêche la diffusion de l'amour de Dieu sur la société, je dois haïr cet aspect chez l'autre. Cet aspect est à combattre chez lui, doit au moins être mis en mesure de ne pas nuire au bien voulu par Dieu, tout en continuant par exemple à prier et à agir pour la conversion de ce frère. Ce frère est haï dans la mesure où il est lointain et nous éloigne de Dieu, mais est aimé dans la mesure où rien n'est perdu et où il peut encore s'approcher de Dieu, comme dirait Saint Thomas « en tant qu'il est encore capable de béatitude ». Et cette « capacité de béatitude » fait loi dans l'ordre selon la charité qui se fonde sur la mineure ou majeure participation à l'amour de Dieu. L'ordre n'est pas sentimentalo-passionnel, selon qui je croise - ou pire selon ce que la télévision veut nous faire voir sur l'écran - mais il est objectif. Saint Thomas dit « il ne faut pas aimer davantage celui qui est plus facile à voir, mais celui qui se présente à nous comme à aimer » [vi]. C'est-à-dire que, en suivant Saint Thomas, de la même façon que je dois aimer davantage Dieu, même s'il n'est pas visible, plutôt qu'une personne que je croise dans la rue et qui est très lointaine de Dieu, ainsi je dois aimer davantage une personne par rapport à une autre parce que je sais qu'elle est plus proche de Dieu.

Lorsque nous écoutons - et d'ailleurs avec une fréquence excessive - sur la bouche d'éminents ecclésiastiques, des phrases comme celle-ci : « Est ce que j'aime vraiment mon prochain, est ce que j'aime vraiment l'immigré, même s'il est musulman ? » La réponse du chrétien qui a la vraie charité et qui connaît la doctrine est : « Oui, mais je l'aime par amour de Dieu et donc selon l'ordre voulu par Dieu ». Ce qui signifie que j'ordonne mon exercice de la charité envers lui selon l'amour de Dieu. Et je dois aller jusqu'au point de vouloir pour lui tout le bien possible, jusqu'au bien suprême de sa conversion à la vraie foi, pour qu'il ne brûle pas éternellement en enfer et pour qu'il participe en acte (et non pas seulement en puissance) de cette béatitude qui est - comme on l'a vu plus haut - le fondement de l'ordre de la charité. En effet, dans le véritable ordre de la charité je n'aime pas mon prochain seulement parce qu'il est mon semblable ou parce que j'ai une sympathie pour les gens de couleur plutôt que pour les blancs, mais ce qui rend le prochain digne d'être aimé plus qu'un autre est sa similitude avec Dieu[vii]. En charité, je peux - et je dois - aimer davantage un riche authentiquement vertueux plutôt qu'un pauvre plein de malice, ainsi que m'est davantage prochain un baptisé aisé plutôt qu'un immigré musulman pauvre. Il y a un ordre objectif à observer dans l'amour surnaturel qui cependant n'exclut pas, suivant les circonstances et s'il s'agit du bien objectif, la possibilité d'aider matériellement même ce pauvre-là quoique éloigné de Dieu. Donne à manger aux affamés, donne à boire aux assoiffés, certes, mais selon un critère objectif, et non pas médiatico-émotionnel et dicté par les centrales du mondialisme maçonnique qui créent d'abord la misère des peuples et ensuite la font soulager aux autres.

 

L'accueil sans discrimination ne témoigne pas l'amour de Dieu, mais l'amour désordonné pour certaines réalités terrestres

Nous ajoutons que le désordre dans l'accueil des peuples, dans l'encouragement à leurs déplacements désordonnés, dans l'altération de la vie pacifique de certaines nations, dont certaines de tradition chrétienne, n'est pas un signe de charité. Au contraire, c'est peut-être justement un des signes que l'on ne marche pas dans l'amour de Dieu.

Saint Thomas explique que l'amour naturel se fonde sur la communication des biens naturels, et par un tel amour non seulement on aime Dieu plus que soi-même, mais on aime chaque créature selon ce qu'elle est, selon la place que Dieu lui a assignée. Un tel amour parvient à chaque créature, jusqu'aux pierres elles-mêmes, parce que c'est un amour qui aime l'ensemble de la Création selon l'ordre voulu par Dieu, et un tel amour privilégie le bien de l'ensemble à son propre bien particulier. Et cela vaut encore plus dans l'amour de charité, selon lequel l'homme doit aimer davantage Dieu, qui est le bien commun de toute chose, plutôt que lui-même[viii].

En suivant donc le raisonnement de l'Aquinate on aime chaque créature - jusqu'aux pierres - dans l'ordre voulu par Dieu et donc on aime les peuples sur leurs terres et avec leurs caractéristiques et leurs bonnes traditions, dans l'ordre que Dieu a donné en les distinguant. Si on a compris le discours, pour qu'il s'agisse d'un vrai amour, la partie doit aimer d'abord le tout dans la disposition des parties et donc chercher son propre bien dans la mesure où un tel bien s'intègre dans le tout, dans la mesure où le bien de la partie concourt au bien du tout. C'est la partie qui doit se conformer au bien commun lorsqu'elle détermine son propre bien et ce n'est pas le bien commun qui doit être remodelé en fonction de la partie[ix].

Par exemple, en ce qui concerne notre sujet, l'immigré qui arrive et demande accueil ne peut pas être vu seulement dans un rapport de bien du sujet particulier dans le besoin, ou dans une vision personnaliste de la relation entre moi qui accueille et lui qui me demande hospitalité. Mais l’opportunité de l' accueil est à évaluer selon une vision de bien commun et surtout de bien commun surnaturel. Les questions de foi sont donc fondamentales parce que - s'il s'agit de vraie charité - le premier bien à évaluer sera celui de la foi, du bien commun de la foi d'un peuple et du monde entier. Donc l'appartenance à une religion sera un critère important à évaluer dans la perspective de la charité de l'accueil. Justement parce que le bien commun surnaturel, que la (vraie) charité a le devoir de sauvegarder, est en jeu.

Non seulement donc la prudence naturelle et surnaturelle doit pousser les gouvernants à limiter l'accès de celui qui attaque ou affaiblit le bien de la foi, mais dans une vraie perspective de bien commun surnaturel il pourrait être aussi nécessaire, dans certaines circonstances, de refuser complètement l'accès de certains étrangers. On pourrait même ajouter qu'il faudrait évaluer attentivement l'opportunité d'accueillir des hommes chrétiens en bonne santé qui fuient, surtout s'ils sont en train de fuir une guerre, alors qu'ils auraient au contraire le devoir de combattre pour le bien commun de leur patrie ou de la foi. Si c'est le bien commun de la foi et de la charité que nous cherchons - tout en pouvant accueillir temporairement des femmes et des enfants - nous devrions aussi, dans certains cas, stimuler les hommes chrétiens en bonne santé et aptes aux armes à rester dans les terres chrétiennes pour les défendre et pour éviter le rétrécissement des confins de la Chrétienté (ou de ce qu'il en reste). C'est cela aussi la charité, et de courageux Évêques syriens l'ont affirmé récemment à haute voix.

Quant aux musulmans, même en voulant admettre sans le concéder, qu'il s'agisse d'une immigration de nécessité, et non pas un processus maçonnique de substitution des peuples, il est plus que licite de freiner les arrivées, parce qu'en tant que disciples du Coran il est raisonnable de présumer qu'ils en veulent l'application, sous peine de ne plus être musulmans. Il est impossible de ne pas comprendre comment leur arrivée massive pourrait ne pas nuire gravement au bien surnaturel de la foi et de l’Église elle-même, à plus forte raison si on renonce - par absence de charité - même à essayer de les convertir à la vraie foi. On ne comprend pas non plus comment un prélat catholique - qui devrait bien savoir ce qu'est la charité - pourrait prêcher l'accueil des migrants à tout prix tout en se refusant à faire une quelconque distinction, presque comme s'il s'agissait d'un dogme révélé. Et cela est encore plus incompréhensible car il n’est pas nécessaire d’avoir la foi et la charité pour saisir combien l’immigration islamique est dangereuse. Le Cardinal Biffi, s'adressant aux gouvernants laïcs disait à ce propos : « Cela ne revient pas aux hommes d’Église, mais plutôt aux états occidentaux modernes de bien regarder le pour et le contre à ce sujet »[x]. Il en résulte qu’un homme d’Église a donc à double titre le devoir d'inciter les gouvernants à limiter l'immigration islamique : en raison de la loi naturelle et en raison de la vraie charité du Christ.

 

Don Stefano Carusi

 

 

[i] Saint Thomas d’Aquin, De Regno, lib. 2, cap. 3: “Nam civitas quae ad sui sustentationem mercationum multitudine indiget, necesse est ut continuum extraneorum convictum patiatur. Extraneorum autem conversatio corrumpit plurimum civium mores, secundum Aristotelis doctrinam in sua politica, quia necesse est evenire ut homines extranei aliis legibus et consuetudinibus enutriti, in multis aliter agant quam sint civium mores, et sic, dum cives exemplo ad agenda similia provocantur, civilis conversatio perturbatur. Rursus: si cives ipsi mercationibus fuerint dediti, pandetur pluribus vitiis aditus”.

[ii] S. Thomas d’Aquin, S. Th., IIa IIae, q. 26, pr. “Deinde considerandum est de ordine caritatis. Et circa hoc quaeruntur tredecim”.

[iii] Ibidem, a. 1, c. : “Respondeo dicendum quod, sicut philosophus dicit, in V Metaphys., prius et posterius dicitur secundum relationem ad aliquod principium. Ordo autem includit in se aliquem modum prioris et posterioris. Unde oportet quod ubicumque est aliquod principium, sit etiam aliquis ordo. Dictum autem est supra quod dilectio caritatis tendit in Deum sicut in principium beatitudinis, in cuius communicatione amicitia caritatis fundatur. Et ideo oportet quod in his quae ex caritate diliguntur attendatur aliquis ordo, secundum relationem ad primum principium huius dilectionis, quod est Deus”.

[iv] S. Thomas d’Aquin, S. Th., q. 26, a. 1, ad 2. Cfr. anche q. 26, a. 2, ad 3: “Sed tamen non aequaliter habet proximus bonitatem Dei sicut habet ipsam Deus, nam Deus habet ipsam essentialiter, proximus autem participative”.

[v] Ibidem, q. 26, a. 2, c: “Amicitia autem caritatis fundatur super communicatione beatitudinis, quae consistit essentialiter in Deo sicut in primo principio, a quo derivatur in omnes qui sunt beatitudinis capaces. Et ideo principaliter et maxime Deus est ex caritate diligendus, ipse enim diligitur sicut beatitudinis causa; proximus autem sicut beatitudinem simul nobiscum ab eo participans”.

[vi] Ibidem, q. 26, a. 2, ad 1: “non ergo oportet quod illud quod est magis visibile sit magis diligibile, sed quod prius occurrat nobis ad diligendum”.

[vii] Ibidem, q. 26, a.2, ad 2 : “Ad secundum dicendum quod similitudo quam habemus ad Deum est prior et causa similitudinis quam habemus ad proximum, ex hoc enim quod participamus a Deo id quod ab ipso etiam proximus habet similes proximo efficimur”.

[viii] Ibidem, q. 26, a.3, c. : “Unde multo magis hoc verificatur in amicitia caritatis, quae fundatur super communicatione donorum gratiae. Et ideo ex caritate magis homo debet diligere Deum, qui est bonum commune omnium, quam seipsum, quia beatitudo est in Deo sicut in communi et fontali omnium principio qui beatitudinem partecipare possunt”.

[ix] Ibidem, q. 26, a.3, ad 2.

[x] G. Biffi, Intervento dell'arcivescovo di Bologna al Seminario della Fondazione Migrantes, 30 septembre 2000 (http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/7283) : «Non sono dunque gli uomini di Chiesa, ma gli stati occidentali moderni a dover far bene i loro conti a questo riguardo».

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Nouvelles de la Communauté Saint Grégoire le Grand après le séisme de Camerino et Nursie

par Disputationes theologicae

3 novembre 2016, dans l’Octave des Saints
 

Dimanche dernier, les Saintes Messes de la Communauté dites en plein air

 
 
Beaucoup d’amis et de lecteurs nous ont écrit ou ont cherché à nous contacter suite aux secousses sismiques qui ont détruit ou gravement endommagé tant d’édifices de notre région. Avant toute chose, merci à tous ceux qui ont eu cette pensée et qui sont déjà en train de prier pour nous, pour toute la population accablée et pour cette région. Ne pouvant répondre à chacun personnellement nous donnons quelques informations sur notre site et nous proposerons quelques réflexions d’ordre plus général car “non si muove foglia che Dio non voglia” (aucune feuille ne bouge sans que Dieu le veuille) et parce que nous savons bien aussi que Dieu parle par les événements.
 
Les secousses entre Camerino et Nursie ont été violentes et continuent toujours. La dernière, ce matin, a été d’une magnitude de 4,8 et l’épicentre se trouvait à moins de 20 kilomètres de chez nous; vers une heure du matin elle a réveillé et apeuré même ceux qui dormaient dans leur voiture ou sous tente. Le grand tremblement dans la matinée de dimanche dernier avait déjà augmenté les dommages causés par la secousse du 26 octobre et en avait causé de nouveaux, mais la répétition des mouvements telluriques cause de nouvelles destructions et fait qu’il n’y a pas de lieux vraiment sûrs. Dans ce monde d’aujourd’hui dans lequel l’homme se croit presque Dieu, on expérimente l’impuissance de la créature et les certitudes mondaines s’effritent. Au sens littéral.
 
A Camerino on vénère depuis toujours comme protectrice contre les tremblements de terre l’icône miraculeuse de Santa Maria in Via, et encore cette fois l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie nous a protégés. Il n’y a eu aucune victime, nous sommes tous sains et saufs et le bâtiment que la Communauté utilisait n’a pas subi de grands dommages pour le moment et peut en partie être utile comme point d’accueil pour ceux qui habitent non loin de chez nous et dont les maisons sont trop endommagées, ne pouvant même pas y entrer pour prendre un café. 
 
Inévitablement ces événements comporteront une réorganisation temporaire, mais nous nous remontons déjà les manches, car la vie va de l’avant même sous les secousses et pour cela nous vous demandons de vous souvenir de nous dans votre prière quotidienne. Pour ceux qui ont demandé comment faire pour nous aider à soutenir les nouvelles difficultés, nous donnons nos coordonnées, en rappelant que toute aide est précieuse et qu’il n’y a pas de petites aides (pour des dons depuis la France (IBAN) FR 76 30004 00602 000 1038 5722 55, reçu fiscal possible; pour des dons depuis l’étranger ajouter (BIC) BNP AFRP PAVI). Adresse mail : acsanctusgregorius@gmail.com
 
Enfin, une courte réflexion : la Basilique du Patriarche de l’Europe s’écroule, secouée par un tremblement de terre, le même jour où débute un voyage apostolique pour honorer Luther, pour commémorer le destructeur de l’Europe chrétienne, le blasphémateur de la Très Sainte Vierge Marie, le profanateur de la Très Sainte Eucharistie et le calomniateur de la Papauté. Difficile de ne pas penser que cela ne soit pas un signe de Dieu aux hommes et par dessus tout aux hommes d’Eglise.
 
Voilà qu’elle a été notre réflexion en communauté, quelques minutes après la terrible secousse de dimanche dernier quand nous sommes sortis à l'extérieur des maisons et que nous arrivaient à peine les douloureuses images de la destruction de Nursie et de la maison natale de Saint Benoit. Quelques prêtres du diocèses, d’orientations différentes des nôtres, nous ont confié qu’ils ont eu cette même pensée qui fait froid dans le dos. Et peut-être l’ont-ils eue aussi au Vatican, tant est si bien qu’il semble que les cérémonies en Suède, bien que scandaleuses, ont eu des tons moins triomphalistes que ce qui était programmé. Il n’est pas impossible que même “in altissimo loco” ait été faite la même connexion et qu’on ait pensé aux destructions dont parle la Très Sainte Vierge Marie à Fatima...si la conversion n’intervient pas. A Rome, parmi tous les ecclésiastiques qui ont bien ressenti la secousse, il y a eu une grande frayeur et aussi quelques dommages à Saint Paul hors les murs, en plus des églises de Saint François de Paule et de Sant’Eustache qui sont fermées au public.
 
Mais sur le tremblement de terre et sur “son explication” nous laissons la parole à la liturgie de l’Eglise, car nous ne trouvons pas de paroles plus éloquentes que ces prières et nous invitons tous les prêtres à les ajouter lors de la célébration de la Sainte Messe :
 
Collecte
O Dieu tout-puissant et éternel, qui regardez la terre et la faites trembler, ayez pitié de ceux qui vous craignent, afin que si nous avons redouté la colère du Seigneur lorsqu’il secouait les fondements de la terre, nous ressentions toujours les effets de sa clémence qui guérit ce qu’il a brisé.
 
Secrète
O Dieu qui avez affermi la terre sur son centre, recevez les prières de votre peuple et après avoir écarté les dangers du tremblement de terre, changez les terreurs de votre divine colère en remèdes pour le salut des hommes; afin que ceux qui ont été formés de la terre et qui doivent retourner en poussière, aient le bonheur de devenir citoyens du ciel par leur vie sainte.
 
Postcommunion
Protégez-nous, Seigneur, nous vous en supplions, tandis que nous prenons part à vos saints mystères, et par un bienfait d’en-haut, raffermissez cette terre que nous avons vue trembler en punition de nos iniquités; afin que les coeurs des mortels sachent que de tels fléaux proviennent de votre indignation et que dans votre miséricorde vous les faites cesser.

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Un Chapelet pour Rome

par Disputationes theologicae

7 octobre, Notre Dame du Très Saint Rosaire Reine des Victoires
 
 

 
1er octobre 2016. Quatre églises agressées à Rome.
Photo de la profanation de l’église Saint Vital
 
 
“Le Saint Père (...) traversa une grande ville à moitié en ruine et à moitié tremblant, d’un pas chancelant, affligé de douleurs et de chagrin, il priait pour les âmes des cadavres qu’il rencontrait sur son chemin” (tiré de la partie révélée du Troisième Secret de Fatima).
 
La récitation fréquente du chapelet ou d’une partie de celui-ci pour la préservation de la Ville Sainte de Rome. Le 7 octobre 1571 le Ciel bénissait la prière du Pape et sauvait la Chrétienté de l’Islam, le matin du 7 octobre 2016 un éclair du ciel frappait la coupole de la Basilique Saint Pierre. Un signe des temps ?
 
“Regardez, mon père, la Très Sainte Vierge Marie a voulu donner, en cette fin des temps dans laquelle nous vivons, une nouvelle efficacité à la récitation du Très Saint Rosaire. Elle a tellement renforcé son efficacité, qu’il n’existe aucun problème, aussi difficile soit-il, de nature matérielle, ou, surtout, spirituelle, dans la vie privée de chacun de nous, ou dans la vie de nos familles, des familles du monde entier, des communautés religieuses, ou encore dans la vie des peuples et des nations qui ne puisse être résolu par la prière du Très Saint Rosaire. Il n’y a aucun problème, je vous dis, aussi difficile soit-il, qui ne puisse être résolu par la récitation du Très Saint Rosaire.
 
Par le Très Saint Rosaire nous nous sauverons, nous nous sanctifierons, nous consolerons Notre Seigneur et nous obtiendrons le salut d’un grand nombre d’âmes” (Soeur Lucie au Père Fuentes).
 
Nous invitons tout le monde à s’unir dans une grande “chaine” de prières pour Rome.
 
O mon Jésus, faites miséricorde pour Rome!
 
La Rédaction de Disputationes Theologicae

 

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